Résumé : In 2454, the leaders of the great globe-spanning Hives, which have replaced geographic nations, have long conspired to keep the world stable, but that balance is beginning to give way. The secret of Mycroft Canner’s rampage lies open for exploitation. Police investigation has uncovered a massive, unsuspected crime. An urban center of depravity and political control has been revealed. The secret of the child Bridger’s supernaturality is spreading. A long-hidden warmonger has returned to harangue the populace in archaic style.
Edition : Tor Books
Mon Avis : Il y a quelques mois, pour le challenge que je m’étais lancé de lire les nominés au prix Hugo 2017, je me suis embarqué dans le premier tome de ce cycle : Too Like The Lightning. J’étais alors ressorti plus que convaincu, ayant passé un excellent moment de lecture avec un récit dense, intelligent, entraînant et efficace, dont j’avais hâte de voir comment l’autrice allait gérer la suite des évènements (ma chronique ici). Il était donc logique que je fasse entrer rapidement cette suite dans ma PAL, surtout que bon le tome 3 est déjà publié. Concernant l’illustration de couverture, je la trouve très réussie pour ma part. Alors je vais essayer d’éviter de spoiler le premier tome, mais, je préviens, ce ne sera pas facile.
Ce roman nous plonge directement à la suite du premier tome. L’Utopie qui nous était présenté par Mycroft dans le premier tome commence à vaciller. L’enquête de police ainsi que les évènements qui ont découler du vol de la Seven-Ten liste sont en train de chambouler l’ordre politique, pire ils pourraient même remettre en cause plus de 300 ans de paix. Surtout, cela a obligé Bridger, l’enfant dieu qui est capable de donner vie à n’importe quel objet, a devoir fuir et se cacher. Bon autant le dire tout de suite, ce second tome est selon moi clairement à la hauteur du premier, voir même meilleur que celui-ci. Il n’y a plus ce petit côté perdu, lié à la découverte, au fait qu’on doit assembler les éléments pour comprendre ce fut. On se retrouve ainsi plongé dès la première page dans l’intrigue qui, là où Too Like The Lightning posait les bases parfois de façon dense, vient accélérer l’ensemble pour offrir un second tome encore plus prenant et entraînant devant les nombreuses manipulations, jeux de pouvoir et de haine, ainsi que leurs conséquences. Dans ce second tome tout prend du sens, tout gagne en complexité, en intensité, en révélations tout en gardant, je trouve, cette fluidité et cette intelligence.
C’est d’ailleurs un point franchement fascinant de ce roman, les nombreuses pistes de lectures que l’on peut y trouver. En effet chacun pourrait presque y trouver son compte dans ce roman, que vous cherchiez simplement un roman politique, ou un récit plus philosophique et poussant à la réflexion vous pourriez trouver votre bonheur tant Ada Palmer maîtrise l’ensemble. En effet que ce soit dans la construction de son fil rouge, offrant rebondissements, révélations et surprises, ou bien dans son travail philosophique et de spéculation qui s’avère dense, intelligent et soigné, l’ensemble fonctionne, je trouve, parfaitement bien. On ne ressent jamais de longueurs ou de lourdeurs ce qui fait qu’on se retrouve à tourner les pages avec l’envie de savoir jusqu’où elle va nous emmener. Autre point intéressant dans ce second, sans trop en dévoiler ce qui est compliqué au vu de la densité de l’œuvre où tout a son importance, c’est que le récit rebat complètement les cartes. Ce que j’entends par là c’est que des nombreuses questions soulevées dans le premier tome trouvent leurs explications ici tout en réussissant à amener, de façon efficace et intelligente, de nouvelles problématiques qui renouvellent ainsi l’intérêt du lecteur.
L’univers est toujours aussi intéressant à découvrir, même si il est toujours compliqué d’en parler sans trop en dévoiler. Cette utopie qui nous était présentée dans le premier tome, ne reposant pas sur des pouvoir liés à des États, mais plus sur des alliances, des choix philosophiques et de vies reposant ainsi plus sur des groupes de sympathies que sur des notions de nations, qu’il est possible de changer en fonction de son évolution commence à montrer ses limites. Les notions de genres, de religions et tout ce qui était considéré comme conflictuel a complètement disparu, empêchant ainsi certaines chaînes « psychologiques » et sociales, mais cela n’empêche pas pour autant d’amener des conflits. Il ne suffit pas de les faire simplement disparaitre pour que l’humanité toute entière les oublie et n’en ressente les effets, ni les conséquences. Cela amène obligatoirement des tensions, des frustrations, des secrets, mais aussi des manipulations aussi bien politiques que personnelles. Comme si leurs simples disparitions ne changeaient en rien le fond des Hommes. Et le tout est amené de façon pertinente, cohérente sans jamais tomber dans la lourdeur ou les longueurs. On en comprend ainsi l’intérêt de cet avenir d’avoir fait ses choix, mais aussi les limites et les craquelures qui commencent à apparaitre. L’Homme restera peut-être toujours un animal, malgré tout le vernis que l’on peut apposer. Les technologies présentées restent toujours intéressantes même si classiques et commencent un peu à avoir de l’importance aussi dans l’intrigue.
Le gros point fort de ce roman vient toujours de l’aspect philosophique et les réflexions que soulève le récit. Cela pourra peut-être en déranger certains, surtout si vous cherchez un récit rapide, mais je trouve que, pour ma part, cela offre un vrai plus à l’intrigue et au développement des péripéties. Que ce soit dans la notion politique, leurs dynamiques, leurs interactions, mais aussi dans l’évolution de chacun, tout cela soulève ainsi de nombreuses questions que ce soit sur nous-même, la notion de paix, de liberté, de choix ou bien encore sur la notion de famille, de dynamique de groupe, d’influence, de vision de vie, mais avec ce tome vient aussi l’aspect de la guerre qui est au centre de l’intrigue. Une longue paix amène-t-elle toujours la guerre, l’Humanité ne peut-elle pas avancer sans créer de conflits, sans accepter les autres tout simplement ? Surtout que, si la guerre devait apparaitre, elle serait beaucoup plus meurtrière au vu de l’évolution technologique. Le seul espoir ne repose-t-il pas alors sur un dieux, Bridger, qui est capable de sauver tout le monde ? Il y a ainsi de nombreuses questions et de notions métaphysique qu’il en est difficile de faire le tour, mais qui sont amenées ici de façon astucieuses et subtiles, ne cherchant jamais à forcer le lecteur mais plus à le pousser à se questionner. Alors parfois, c’est vrai, l’autrice m’a paru en faire trop, mais franchement rien qui ne se ressent vraiment tant l’ensemble est maîtrisé et fluide.
Concernant les personnages ils sont toujours aussi captivants à découvrir et à suivre. N’étant pas genré et le narrateur s’amusant même à changer les genres des uns et des autres en fonction des situations, il est difficile de les classer, mais au bout de deux tomes on passe facilement outre pour les accepter comme ils sont, à suivre leurs évolutions, leurs changements, à ne finalement plus les juger pour leurs physiques ou autres, mais plus sur leurs personnalités, leurs constructions, leurs visons, leurs envies. On découvre ainsi de nombreux personnages fascinants, complexes et entraînants ne laissant pas indifférent avec en point d’orgue Mycroft. En effet on avait découvert dans le premier tome que le héros du récit était loin d’être un ange, on se rend compte ici qu’il ne l’est clairement pas, mais on découvre aussi ses motivations, ce qui l’a amené à devenir le monstre qu’il a été. Cela ne rachète en rien ce qu’il a fait, ça ne le rend pas gentil ni chevalier blanc pour autant, mais d’une certaine façon on se laisse tout de même porter par ce qu’il recherche, ses aventures, son but. On en apprend plus aussi sur son importance, principalement son rôle au niveau des pouvoirs en place. Les personnages secondaires ne sont pas non plus en reste, chacun développant une personnalité proche, même si parfois cela tombe un peu, je trouve, dans l’exubérant, sans que cela ne s’avère non plus bloquant.
Alors après je reste toujours aussi perplexe par l’envie du narrateur de vouloir briser le quatrième mur et de tenter de communiquer avec nous, pas toujours en accord avec ce que je pense et donnant une impression un peu factice de tension. J’ai aussi trouvé qu’une ou deux scènes étaient un peu trop théâtrales, mais franchement il s’agit de défauts très vite oubliable. Pour moi au final Ada Plamer construit pour le moment un cycle fascinant , dense, avec des réflexions efficaces, complexes et qui pousse le lecteur à se questionner et ne laisse pas indifférent. Je ne sais pas si un tel avenir sera un jour possible, mais cela ne l’empêche de faire écho à notre société et en tout cas il s’agit clairement d’un roman de SF qui, je trouve, mérite d’être découvert au moins pour se faire un avis tant il va plus loin que nous raconter une simple histoire. Le tout est aussi porté par une plume vivante, dense et entraînante et je lirai sans soucis la suite de ce cycle, surtout que la conclusion de ce tome ouvre à de nombreux changements.
Il est à noter que, normalement, les deux premiers tomes devraient sortir en VF aux éditions Le Bélial’, mais, si je ne me trompe pas, aucune date de publication n’est encore annoncée.
En Résumé : J’ai passé un excellent moment de lecture avec ce second tome de ce cycle qui m’a paru encore un cran au-dessus du premier maintenant qu’on s’est habitué à l’univers et a sa complexité. Il nous offre ainsi une histoire qui est à la fois entraînante et pleine de rebondissements, tout en se révélant intelligente et ne laisse pas indifférent. L’univers est toujours aussi intéressant à découvrir que ce soit dans ses notions de groupes, leurs dynamiques et leurs secrets. On découvre un avenir où les religions, les notions de genre et autres « chaînes » ont disparu, mais cela n’est pas sans avoir des conséquences. Une utopie qui, sous les révélations, qui commence à craqueler. Les personnages sont toujours aussi captivants à suivre et à découvrir que ce soit dans leurs jeux de pouvoir, leurs évolutions ou encore leurs visions. Mycroft est un héros toujours aussi ambigu, loin du chevalier blanc et plus près même du monstre, mais qui pourtant ne manque pas de complexité et d’intérêt. Le gros point fort du roman vient clairement de l’aspect philosophique et des nombreuses réflexions que soulève le livre, que ce soit aussi bien sur l’aspect politique que sur nous-même ou bien encore sur nos principes de vies. Surtout il le fait de façon soignée, pertinente, n’imposant jamais de vision, mais nous poussant à réfléchir. Alors après je pourrai regretter le fait que Mycroft cherche à communiquer avec le lecteur, ce qui ne me parait pas toujours utile, ou ne ou deux scènes un peu trop théâtrales, mais franchement là je chipote un peu tant l’ensemble se révèle vivant, intelligent et terriblement efficace. Le tout est porté par une plume soignée, entrainante et je lirai avec grand plaisir et très rapidement le troisième tome.
Ma Note : 9/10
Nathalie
YES ! Ta chronique est la première que je lise après avoir lu le livre moi-même (il y a quelques mois déjà) et je partage ton avis à 100%. Le premier tome pouvait être un peu laborieux parce qu’on avait tant à apprendre, mais là, on est dans l’action et les révélations jusqu’à (ATTENTION SPOILERS) l’effondrement final. Palpitant et tellement, tellement riche ! J’ai trouvé particulièrement intéressant le fait que le premier tome nous présente ce qui ressemble quand même fort à une utopie, et ce tome-ci nous prouve que non, c’est loin d’être le cas. Par exemple l’absence de genre et la liberté totale à ce niveau-là c’est quelque chose qui semble très positif a priori, mais on découvre qu’en fait la question a été évacuée, pas résolue. Même chose pour la religion, qui a été complètement rejetée, ce que beaucoup souhaiteraient à l’heure actuelle, mais dans ce tome on apprend que finalement elle survit en cachette (cfr. soeur je-ne-sais-plus-quoi) et que le système de réflexion guidée qui la remplace est aussi corrompu que n’importe quelle Eglise. Bref, je pourrais en parler des heures 😀 Tu comptes lire le quatrième tome bientôt ?
BlackWolf
Ah mais oui c’est vraiment un livre fascinant et je pourrait en parler aussi pendant des heures. Comme tu le dis il ne suffit pas de simplement arrêter d’en parler et de vouloir faire disparaitre certains aspects pour que cela fonctionne, il ne suffit pas de dire que c’est illégal ou tabou pour qu’on ne soit plus du tout impacté par ces derniers. C’est d’ailleurs ce travail de réflexion fascinant et qui pousse le lecteur à se questionner que je trouve très intéressant.
Concernant le troisième tome, oui je pense le lire dans les prochains mois. Pour le quatrième il n’est prévu qu’en 2019 je crois, j’ai encore un peu le temps.