Résumé : Paris n’est plus que ruines.
Et le prix de la cervelle fraîche s’envole.
Heureusement, il reste des punks.
Et des bières.
Et des acides.
Et un groupe électrogène pour jouer du Discharge.
Le Club des punks va pouvoir survivre à l’Apocalypse.
Enfin, si en plus des zombies, les gros cons n’étaient pas aussi de sortie…
Il est grand temps que l’anarchie remette de l’ordre dans le chaos !
Edition : ActuSF
Mon Avis : De Karim Berrouka, j’ai lu sa nouvelle qui avait été publiée dans l’anthologie Lancelot (ma chronique ici), ainsi que son roman Fées, Weed & Guillotines (ma chronique là), qui m’avaient chacun offert un bon moment de lecture à la fois plein d’humour barré et d’énergie. Il est donc logique que je me sois laissé facilement tenter par son dernier roman publié, qui a décidé de revisiter à sa façon le mythe du zombie. On notera la couverture, illustrée par Diego Tripodi, qui a le chic pour nous mettre directement dans l’ambiance.
On se retrouve ainsi à suivre un groupe de punks qui squatte une ancienne fabrique de vitraux, le collectif 25, luttant chacun à leur façon contre certaines idéologies. Sauf que voilà, en cette nuit de juin tout va basculer, les zombies vont apparaitre. L’idée même de mélanger le concept de Punks et de zombies à quelque chose d’intéressant, entre le no futur rebelle, sauvage et l’apocalypse mangeur de cervelles, il y a de quoi offrir des idées originales ce qu’il faut bien admettre le récit offre justement. Je me suis ainsi rapidement retrouver happé par les aventures que vont vivre cette bande de keupons. Il faut dire aussi que le début se révèle terriblement efficace, que ce soit dans l’introduction de l’apocalypse qui est du pur délire, comme à travers la façon dont vont la vivre chacun des héros, entre survie et rêves les plus fous. L’ensemble se révèle ainsi clairement barré et surtout possède une énergie communicative qui fait qu’on se laisse ainsi facilement emporter, tant par le délire proposé que par les péripéties qu’ils vont rencontrer. Chaque page fait sourire le lecteur, que ce soit dans la façon dont l’auteur met en avant sa vision de cette fin du monde, mais aussi dans chacun des personnages. Pour bien rentrer dans ce livre il faut par contre oublier une partie de la logique, mais j’y reviendrai plus tard.
Le point le plus intéressant du récit, autre que l’aspect déconne, vient clairement des personnages. Dire qu’on sort des héros classiques de ce genre de récit est un euphémisme, on est loin ainsi des survivants apeurés qui fuient pour survivre ou des militaires baraqués, et la façon dont chacun des personnages principaux va « gérer » cette apocalypse va se révéler vraiment intéressante, percutante et frénétique. Surtout que bon, libéré de la société, de ses règles, il y a de quoi parfois s’épanouir au mépris de la plus grand logique. L’intérêt principal vient principalement que l’auteur a réussi à nous offrir des personnages complexes, humains, avec leurs forces et leurs faiblesses, leurs combats et leurs envies. Il offre ainsi une diversité qui, d’une certaine façon, ne tombe jamais dans la caricature et permet ainsi d’amener quelque chose de plus dense et de plus travaillé. On est loin de l’image que se font la plupart des gens du mouvement punk, offrant ainsi au final des gens comme vous et moi à la vision simplement et fortement différente de la vision générale du monde. Alors parfois on tombe un peu trop dans certains stéréotypes, mais rien de non plus trop gênant. Par contre, je regrette un léger manque d’émotion, principalement dans certaines scènes dont je ne dirai rien pour ne pas spoiler, mais qui paraissent un peu « surjouées » ce qui fait qu’on se doute qu’il y a quelque chose de plus.
Concernant l’univers, d’un point de vue zombie on reste dans le classique et le solide, avec les morts qui reviennent à la vie, avec la grande force et l’effet de masse, et toutes les faiblesses qu’on connait. L’auteur s’offre bien une originalité avec la musique, que je vous laisse découvrir, mais qui par moment m’a paru offrir un peu trop de facilités.. Non, l’intérêt vient principalement quand l’auteur profite de cette apocalypse pour y glisser une réflexion sur notre société et principalement sur le capitalisme qui amène la « mort » de notre société à travers exacerbation de l’individualité de chacun ou encore par notre consumérisme outrancier. J’évite de trop en dire, car certaines analogies liées aux zombies sont vraiment délirantes. Le parallèle se révèle ainsi efficace, percutant et ne laisse pas indifférent, même si c’est vrai on tombe parfois un peu trop dans le binaire avec les gentils d’un côté, les méchants de l’autre et les moutons au milieu. Sauf que voilà cette « caricature » accentuée permet surtout d’exacerber le message qui est transmis, à le rendre plus marquant, pousser le lecteur d’une certaine façon à se sentir troubler, déranger, pour mieux se poser des questions. Ça ne marche pas toujours selon moi, tant parfois l’auteur en fait trop, et tombe dans un message trop simpliste, ce qui fait qu’il passe moins, mais dans l’ensemble ça reste efficace.
Autre point fort du récit, toute la culture punk, révolutionnaire, qui est mise en avant tout au long du récit. Je ne suis pas familier du milieu, mais on sent que Karim Berrouka, lui-même chanteur dans un groupe de punk, en est imprégné et nous la fait partager que ce soit dans la musique, les titres de chaque chapitre ou dans les grandes figures. Il arrive surtout à lier les deux univers pour nous le partager sans se révéler trop lourd ou ennuyeux. Enfin dernier point concernant l’univers, il vient de l’aspect mystique, car oui l’auteur y a ajouté une touche de religion et de vision, tout en gardant toujours cet esprit acerbe et critique. J’avoue je suis resté un peu perplexe, parfois je trouvais que ça n’apportait pas grand chose, mais au final je l’ai trouvé intéressant face à la conclusion qu’il va proposer. En effet la fin est le point d’orgue, cette façon de retourner la situation de façon cynique, je l’ai trouvé réussie et efficace.
Sauf que voilà malgré toutes les qualités que possède ce roman et son esprit complètement barré, certains points m’ont un peu dérangé. Déjà je trouve qu’au niveau du rythme après une première partie plus qu’efficace, l’ensemble s’essouffle doucement, un peu comme si l’auteur tirait un peu trop l’intrigue en longueur ce qui se ressent au milieu du récit, avant de repartir de plus belle. Ensuite, j’ai eu un peu de mal avec la construction du récit, certes c’est énergique, mais l’utilisation récurrente des flashback m’a légèrement frustré, nous faisant vivre des scènes déjà passées qui ne méritaient peut-être pas autant de développement. Enfin j’ai trouvé un peu dommage certains Deus Ex Machina qui finalement servent un peu trop l’intrigue, comme je l’ai dit plus haut il faut parfois oublier la logique et je n’ai pas toujours réussi. Au final cela n’empêche pas non plus ce récit de se révéler très sympathique et divertissant. La plume de l’auteur se révèle efficace, entraînante et simple, plongeant finalement assez facilement le lecteur dans son délire, offrant ainsi quelques sourires et quelques rires. Si vous aimez les romans barrés, la révolution, le no future ou encore les zombies, alors pourquoi ne vous laisseriez-vous pas tenter?
En Résumé : J’ai passé un sympathique moment de lecture avec ce roman qui nous propose de découvrir l’apocalypse zombie à travers un groupe de Punks. Le récit démarre fort, se révélant énergique et surtout offre un pur délire qui nous fait sourire régulièrement, voir même rire. Les personnages sortent clairement des carcans de ce genre de récit, mais surtout l’auteur offre des personnages humains, loin des caricatures et de l’image que peut se faire le grand public des punks ce qui les rend attachants. Je regretterais peut-être juste un léger manque d’émotion par moment. L’univers zombie se révèle classique, ce qui ne l’empêche pas de s’avérer solide et entraînant avec cette originalité concernant la musique qui possède quand même ses limites. C’est surtout concernant toute la culture punk qu’on sent toute la passion de l’auteur ; qu’il cherche à nous faire partager. Il n’oublie pas non plus de chercher à nous faire réfléchir sur notre société, certes parfois de façon frontale, parfois tombant trop dans la caricature, mais dans l’ensemble c’est efficace. Alors après, je reprocherais tout de même un certain essoufflement vers le milieu du récit, une utilisation un peu trop systématique des flashbacks ou encore un peu trop de Deus Ex Machina. Cela n’empêche pas l’ensemble de se révéler plus que divertissant, mais l’empêche de se révéler vraiment marquant. Le tout est porté par une plume simple, efficace et captivante.
Ma Note: 7/10
Autres avis : L’Ours Inculte, …