Résumé : Alors que Main du Diable, le bourreau, est sur le point de battre le record de décollations successives réussies – mille soixante-dix, excusez du peu! –, et qu’il s’en vient sur le marché aux Primeurs de Pékin pour trancher le cou de Tou l’Hôtelier de Sixième Rang (condamné pour hérésie culinaire, mais ceci est une autre histoire), voilà que l’irruption d’un tch’i-mei – comprenez une goule vampire – le déconcentre. À la suite de cette catastrophe capitale, Maître Li et Bœuf Numéro Dix découvrent que le tch’i-mei venait de s’offrir un haut dignitaire chinois comme ultime repas. Les voilà, tous deux, lancés dans une enquête insensée et ô combien dangereuse, à la poursuite d’un tueur en série d’un genre très particulier.
Edition : Denoël Lunes D’Encre
Poche : Folio SF
Mon Avis : Après avoir dévoré le premier tome de ce cycle qui se révélait entraînant et pleine d’humour dans un univers fascinant (ma chronique ici), puis passé un bon moment avec le second tome qui, certes, perdait un peu de son attrait, mais se lisait toujours avec plaisir (ma chronique là), j’ai donc décidé de me lancer dans la lecture dur troisième et dernier tome des aventures de Maître Li et Bœuf Numéro Dix pour savoir ce qu’allait bien pouvoir nous proposer l’auteur. À noter la couverture, illustrée par Yayashin – Bruno Wagner, qui se révèle, je trouve, toujours aussi réussie et agréable.
On se retrouve donc rapidement plongé dès les premières pages dans la nouvelle enquête de nos deux héros, qui vont être obligés de résoudre le meurtre d’un personnage très important, ce qui va les conduire à devoir jouer avec des forces qui les dépassent considérablement. Je dois bien avouer qu’une fois la dernière page tournée, ce troisième tome, sans être celui de trop, m’a paru moins fascinant et moins maîtrisé que les précédents. Ce qui m’avait passionné dans le premier tome a du mal à se dégager ici et parallèlement l’auteur donne aussi l’impression d’avoir un peu de mal à se renouveler au fil des histoires. Alors dans l’ensemble ce n’est pas mauvais, ça se laisse lire et offre un divertissement agréable, mais voilà on sent clairement, de tome en tome, un essoufflement et quand on sait à la base que l’auteur souhaitait écrire 7 volumes, je ne suis pas sûr que j’aurai pu tenir jusque là.
Alors après, tout n’est pas mauvais non plus, loin de là. L’univers développé par l’auteur continue à se révéler toujours aussi passionnant, entraînant, cette sorte de vraie/fausse Chine qui offre au lecteur un décor qui se révèle chatoyant, remplie d’images et magnifique. On ressent toujours la passion qu’à l’auteur pour cette région, tout en l’adaptant, en la rendant légèrement différente, légèrement décalée, et lui offrant aussi de la magie, des divinités et de nombreux autres aspects qui rendent ainsi l’ensemble dense et réussi. On oscille ainsi entre tradition, mystères, légendes et jeux de pouvoir, le tout avec une bonne dose parfois d’extravagance, ce qui pourrait d’ailleurs peut-être en rebuter certains. Il s’agit d’un univers toujours aussi sombre, où la violence et la folie sont toujours présentes, mais contrairement au tome précédent ou l’humour contrebalançait ce côté parfois sanglant, lui offrant un aspect mordant et un décalage intéressant, ici l’alchimie à un peu de mal à fonctionner. L’auteur a du mal à trouver son souffle d’un point de vue humoristique, on y retrouve pourtant toujours des passages toujours aussi drôles et accrocheurs, mais parfois ça tombe à plat voir devient répétitif. C’est dommage.
Concernant l’histoire là aussi je ne sors pas complètement convaincu, pas que l’intrigue soit complètement raté, loin de là, se reposant sur une légende des plus intéressante avec ce qui entoure ces huit magiciens, mais elle m’a paru légèrement brouillonne, comme si l’auteur cherchait plus à perdre le lecteur pour éviter qu’il puisse en deviner les pièges qu’à chercher à construire un récit. De plus l’accumulation de sous-intrigues, qui dans les épisodes précédents se révélaient fluide et cohérente, ici, donne l’impression de parfois faire du remplissage et certaines paraissent inutiles. Une centaine de pages en moins n’aurait, selon moi, rien changé à l’histoire et aurait même permis de la rendre plus tendue et plus fluide. Autre point qui se fait légèrement sentir c’est la capacité de l’auteur à utiliser des mêmes artifices pour faire avancer son intrigue, dans le premier tome c’était nouveau et efficace, dans le second on commençait à le ressentir mais cela gardait de son charme, dans le troisième cela perd clairement de son intérêt et on voit apparaître clairement les rouages. Ensuite le Deus Ex Machina de fin m’a paru un peu trop facile. C’est frustrant, car le fond de l’intrigue possède quelque chose de vraiment entraînant et par moment on retrouve ce côté happant qu’avait les tomes précédents.
Concernant les personnages on retrouve avec plaisir nos deux héros que sont Maître Li, le grand lettré aux multiples idées, connaissances et aussi aux nombreuses surprises et Bœuf Numéro Dix, héros plus « simple », moins complexe et torturé dans ses réflexions, mais qui ne manque pas de se révéler attachant par sa vision du monde et son côté défenseur. Mais voilà je regrette que finalement ces personnages n’évoluent pas énormément au fil des pages de ce tome, un peu comme si leurs aptitudes étaient figés depuis le premier tome et qu’il est impossible de les changer, des les faire douter, voir de simplement les découvrir dans d’autres panels. Peut-être que l’auteur gardait cela pour les suites qui ne verront jamais le jour, mais c’est légèrement frustrant, même si ça n’enlève en rien et le plaisir l’envie de suivre leurs péripéties. Les personnages secondaires ne manquent pas d’intérêt, même si j’avoue je les ai trouvés un peu terne parfois, rien de gênant, mais quand on a croisé, Nuage de Lotus, Fils de Lune et Tourment de L’Aube il est pas toujours facile de tenir la comparaison. Par contre j’ai trouvé dommage que le mystère entourant l’un des personnages soit si facile à deviner, seul les héros à la fin paraissent surpris de la découverte.
La plume de l’auteur se révèle toujours aussi riche, soignée, détaillée et limite poétique, nous emmenant dans un univers à la fois magique et mystérieux pour dénouer une légende qui ne manque pas d’attrait. On pourrait croire en lisant ma chronique que je n’ai pas aimé ce livre, c’est faux, il est plutôt sympathique et offre un divertissement agréable, le soucis vient des attentes que j’avais avec cette série après le premier tome et que je ne retrouve pas complètement ici. Au final j’ai plus l’impression que la série a perdue en qualité au fil des tomes, c’est dommage, même si ce troisième volume se laisse tout de même lire.
En Résumé : J’avoue sortir de ma lecture avec un léger sentiment de déception, pas que ce livre soit mauvais, non, il se révèle sympathique et offre un agréable divertissement, mais voilà il ne répond pas forcément aux attentes que j’avais suite à ma lecture du premier tome. L’histoire n’est pas mauvaise mais m’a paru abuser inutilement de sous-intrigues pas toujours utiles, ce qui rallonge l’ensemble. On retrouve toujours avec plaisir nos héros, même si on commence à regretter qu’ils aient du mal à évoluer au fil des pages. J’ai aussi trouvé certaines révélations un peu trop faciles et le deux ex machina de fin trop simpliste. L’univers se révèle toujours aussi dense, soigné et captivant à découvrir, avec cette Chine Imaginaire magique et pleine de couleurs. La plume de l’auteur est toujours aussi soignée et travaillée. Au final tout se révèle ici être une question d’attente, pour moi ce troisième tome est le moins bon des aventures de nos héros, mais si j’avais commencé ma découverte par ce tome 3 pour finir avec le premier tome j’aurai peut-être été moins critique. Un troisième tome qui reste tout de même plutôt sympathique à lire et à découvrir.
Ma Note : 6/10