Étiquette : fantastique Page 12 of 21

La Fille qui se Noie – Caitlin R. Kiernan

la fille qui se noieRésumé : India Morgan Phelps est schizophrène. Elle a de qui tenir, puisque sa mère et sa grand-mère souffraient toutes les deux de troubles mentaux et ont mis fin à leurs jours. Les médicaments l’aident à garder un semblant de contrôle et pour tenter de comprendre les événements qui ont bouleversés sa vie, elle entreprend de rédiger un récit autobiographique, qui va curieusement prendre la forme d’une histoire de fantômes. C’est le meilleur moyen qu’elle a trouvé pour faire partager ce qui la hante… Car India semble obsédée par sa rencontre avec Eva Canning, une femme qui ressemble trait pour trait au tableau qui l’obnubile depuis son enfance, La fille qui se noie. Elle a déjà vu Eva par le passé, sous la forme d’un fantôme d’un loup-garou… A moins qu’elle ne l’ait jamais vu. Qui sait ce que sa schizophrénie lui fait voir ?

Edition : Eclipse

 

Mon Avis : Le fantastique fait partie des genres qui me passionnent toujours. C’est bien simple mes premières lectures qui m’ont marqué dans l’imaginaire viennent initialement d’auteurs de fantastique avant la SF ou la Fantasy. C’est donc sans surprise que j’ai l’habitude de me pencher sur les quelques sorties qui apparaissent ponctuellement en Librairie. Je me suis donc retrouvé avec ce livre entre les mains, qui m’a rapidement donné envie de le découvrir, déjà par sa couverture que je trouve assez hypnotique et aussi par son résumé offrant une histoire intrigante entre fantômes et folie.

Ce livre nous propose de découvrir alors le journal d’India Morgan Phelps, plus communément appelée Imp, qu’elle commence à écrire suite à plusieurs bouleversements dans sa vie, dont sa fameuse rencontre avec Eva Canning, possible fantôme. Mais voilà elle est différente, elle est schizophrène. Et c’est justement là, je trouve, que se situe la grande force du récit, la façon dont l’auteur va nous immerger dans l’esprit d’Imp, à nous faire découvrir sa maladie et ses différentes manifestations qui viennent régulièrement la déranger. C’est là-dessus que l’auteur offre un énorme travail, adaptant la plume de son personnage en fonction de ses différents changements et de ses différents symptômes, ainsi que ses différents troubles qui apparaissent au fur et à mesure du récit passant de la première à la troisième personne, allant du récit au dialogue avec elle-même. Il y apparait quelque chose de vraiment fascinant à suivre ainsi l’esprit de l’héroïne, sa façon de rationaliser sa vie et chercher à en trouver la clé, à en comprendre les méandres labyrinthiques. Surtout que l’ensemble donne vraiment l’impression de ne jamais tomber dans la caricature, ni vouloir simplement offrir le personnage d’une folle, ce qui est une bonne chose. Elle nous propose plus de découvrir une maladie, avec ses symptômes, sa vision déformée de ce qui l’entoure, de sa vie pas toujours facile et le tout de façon vraiment convaincante, la rendant finalement humaine.

Vient aussi s’ajouter au récit une légère couche de fantastique qui finalement va s’accorder parfaitement à Imp, lui offrir une nuance de mystère supplémentaire. Un fantastique trouble, oscillant entre réalité, mensonge et rêve. La maladie de l’héroïne rend, finalement, ce fantastique plus poignant avec cette incapacité au lecteur à déterminer s’il s’agit d’imagination, due à ses nombreuses obsessions sur les sirènes et le petit chaperon rouge, ou bien s’il y a un fond de vrai dans ce qu’elle voit et ce qu’elle vit avec Eva Canning. Le récit apporte lentement des réponses mais s’amuse à maintenir toujours une phases de doute, ce que j’apprécie, laissant ainsi chacune se faire ses propres choix, ses propres idées et son propre avis. Surtout que l’auteur y ajoute un véritable travail sur l’art et plus principalement la peinture, sur des artistes torturés et des tableaux déroutant, qui permettent d’y ajouter une sorte d’ambiance stressante et un minimum angoissante, ce qui, je trouve, apporte un plus à l’ensemble. On sent que rien n’est laissé au hasard à travers de nombreuses références et un soucis du détail efficace. L’univers de la vie d’Imp est ainsi déroutant, troublant mais clairement entrainant.

Concernant les personnages, je me suis finalement très rapidement attaché à India, jeune fille qui connait sa maladie qui est héréditaire, qui est suivie, prend un traitement et qui vit une vie plutôt normale, avec ses obsessions, ses envies, ses besoins, sa sexualité, sa « banalité ». La vie. Elle se révèle  ainsi être finalement terriblement humaine, avec ses forces et ses faiblesses qu’elle ne maitrise pas toujours et une fragilité qui la rend instable et donne envie de la protéger. Une héroïne touchante même dans ses phases les plus sombres. Sa relation avec Abaylin ajoute aussi une profondeur supplémentaire au personnage, représentée au fur et à mesure comme un roc auquel s’accrocher, qui doit lui permettre de ne pas se noyer, mais qui finalement va aussi jouer un rôle dans sa lente plongée en abyme. Abaylin est d’ailleurs elle aussi un personnage complexe, transsexuelle rejetée par certains de ses amis et de sa famille, qui se cherche aussi une vie a peu près normal, sans non plus trop devoir s’investir socialement, et qui se révèle elle-même ambiguë à travers différents mensonges qu’elle parsème, comme n’importe qui finalement, pour essayer de se magnifier voir d’accrocher Imp.  Les deux héroïnes ne manquent pas d’intérêt, offrent aussi de nombreuses réflexions sur l’acceptation et la différence et se révèlent finalement captivantes.

Mais voilà ce roman est aussi un roman qui peut facilement déconcerter et perdre le lecteur. Comme je l’ai dit on ne rentre pas dans ce roman comme dans une histoire classique et tracée. L’histoire racontée par India est lié par sa maladie, ce qui fait qu’elle part dans tous les sens, garde des informations par devers elle, ne se sentant pas encore prête d’en parler, possède parfois une sorte de fascination pour les chiffres et, selon son traitement, offre aussi dans certains passages remplies de folies. Ce n’est donc pas un livre avec une histoire linéaire, début, milieu, conclusion avec des informations précises et concrètes, c’est un récit qui demande de se laisser porter et de garder l’esprit ouvert. Ce qui n’a pas non plus empêché certains passages de me dérouter, de me perdre dans la conscience d’Imp, ce qui fait que j’ai parfois légèrement eu du mal à retrouver le fil. Rien de bien gênant mais qui surprend. De plus l’auteur aime à garder son récit ouvert, logique la vie n’a pas de conclusion, elle continue quoi qu’il arrive, ce que je trouve fascinant, mais qui, je pense, peut en rebuter plus d’un.

La plume de l’auteur se révèle vraiment soignée, efficace et entrainante, jouant avec les différents styles et écritures pour mieux nous faire découvrir Imp, y ajoutant ainsi aussi deux nouvelles, imbriquées dans le récit, qui je trouve apporte quelque chose de vraiment intéressant. Mon seul petit regret c’est d’avoir vu Neil Gaiman en citation sur la couverture, parlant de poétesse, j’attendais donc quelque chose de peut-être plus poétique, mais rien de non plus bloquant ou gênant. Au final on retrouve ici un roman complexe, qui oscille entre réalité et folie, qui ne plaira sûrement pas à tout le monde, mais qui m’a offert un très bon moment de lecture assez surprenant. Je lirai sans soucis d’autres écrits de l’auteur.

En Résumé : J’ai passé un très bon moment de lecture avec ce roman qui nous propose de plonger dans l’esprit d’India Morgan Phelps qui est schizophrène et qui se met a voir des fantômes. Un journal finalement assez déroutant, mais d’une certaine façon fascinant, bien porté par un travail stylistique captivant, réussi et troublant, ainsi qu’une plume vraiment efficace. L’aspect fantastique s’amuse avec le lecteur, oscillant entre réalité, mensonge et rêve pour mieux surprendre au fil des pages et apporter une ambiance légèrement angoissante. Je me suis retrouvé rapidement happé par ce récit, même si je me doute bien qu’il ne plaira pas à tout le monde, justement par cet aspect où l’héroïne part dans tous les sens, offre des informations parcellaires ou encore sombre dans certaines fascinations et certains troubles. Ce n’est clairement pas un roman linéaire, il faut se laisser porter et emporter par la psyché de Imp même si, j’avoue, parfois je m’y suis quand même perdue. Un récit sur la maladie, la différence qui ne tombe pas dans la caricature, traitant de façon efficace cette différence et le tout avec des personnages poignants et attachants. La conclusion ouverte peut dérouter certains, mais je l’ai trouvé réussie. Je lirai avec plaisirs d’autres livres de l’auteur.

 

Ma Note : 8/10

Trois Oboles pour Charon – Franck Ferric

trois oboles pour charonRésumé : Pour avoir offensé les dieux et refusé d’endurer sa simple vie de mortel, Sisyphe est condamné à perpétuellement subir ce qu’il a cherché à fuir : l’absurdité de l’existence et les vicissitudes de l’Humanité. Rendu amnésique par les mauvais tours de Charon – le Passeur des Enfers qui lui refuse le repos –, Sisyphe traverse les âges du monde, auquel il ne comprend rien, fuyant la guerre qui finit toujours par le rattraper, tandis que les dieux s’effacent du ciel et que le sens même de sa malédiction disparaît avec eux.

Edition : Denoël Lunes d’Encre

 

Mon Avis : J’ai découvert Franck Ferric il y a quelques années, lorsque je suis reparti des Imaginales de l’époque, sous les conseils avisés de Lelf, avec sous le bras mon exemplaire de La Loi du Désert. Livre qui m’avait d’ailleurs offert un excellent moment de lecture, offrant un voyage surprenant, fascinant et mortel (ma chronique ici). Puis je me suis laissé tenter ensuite par Les Tangences Divines, une histoire agréable ramenant les dieux dans notre société, même si je l’ai trouvé moins abouti (ma chronique ). C’est donc sans surprise que le nouveau roman de l’auteur ait rapidement terminé sa course dans ma PAL, il faut dire aussi, bien porté par un résumé intrigant et une couverture, illustrée par Bastien Lecouffe Deharme, que je trouve magnifique.

Ce roman nous propose donc de revisiter, à sa façon, le mythe de Sisyphe qui, pour ceux qui ne le savent pas, suite à une insulte aux dieux se retrouve condamner à pousser au sommet d’une montagne un rocher, qui revient indéfiniment au point de départ avant d’atteindre le sommet. Ici l’auteur a décidé de se servir de cette image et de remplacer le rocher par l’absurdité de la vie, Sisyphe, interdit de rejoindre le monde des morts, devant rejouer indéfiniment la vie, sans véritable but, ni logique. La première chose qui marque une fois la dernière page tournée c’est la plume de l’auteur qui se révèle soignée, travaillée, fine, profonde, et douée d’une richesse et d’une beauté qui rendent les scènes fascinantes, visuelles et surtout terriblement prenantes. Il construit ainsi un roman mélange de violence, d’aventure, de philosophie et de vie, entrainant le tout porté par des dialogues souvent percutants et ciselés. Le style de ses précédents romans me paraissait déjà de qualité, mais ici je l’ai trouvé encore plus abouti, efficace, épuré, offrant ainsi une histoire sans fioritures et au rythme soutenu, oscillant habilement entre scènes de combats haletantes et discussions plus calmes et profondes.

L’autre point fort du récit vient des nombreuses réflexions qui nous sont proposées tout au long du récit, de tout la philosophie que cherche à faire passer l’auteur. Elle se révèle vraiment fascinante et soulève au lecteur un certain nombre de questions. Que ce soit aussi bien dans la répétition de la vie, qui ne se révèle finalement qu’un cycle sans fin et d’une vacuité profonde qu’on comble par des idéaux et des convictions ; ou bien encore sur la capacité de l’humanité de se déchirer dans des guerres, des batailles, voir des haines sans fondements autre que des visions différentes et qui tendent clairement vers l’aberration et l’incongru, bien amené par les souvenirs du héros qui a le chic de se réveiller en plein milieu de batailles ; ou aussi, par exemple, par ce rejet de l’autre, l’inconnu, le différent, celui qui nous fait obligatoirement peur parce qu’il ne correspond pas exactement à notre idée de l’autre, celui qu’on peut aduler au départ et qu’on rejette ensuite. Il n’oublie pas non plus de nous offrir quelques passages intéressants sur la religion et les dieux. Des idées qui se révèlent parfaitement travaillées, soignées, sans jamais vraiment forcer le lecteur, ne cherchant simplement qu’à le faire raisonner. Le tout est aussi porté par un travail historique qui se révèle pointilleux et détaillé, nous plongeant avec facilité dans certaines des grandes batailles connus, que ce soit dans l’annonce de la déroute romaine, dans la lutte des saxons face aux Francs et Charlemagne, lors de conflits franco-espagnols, et bien d’autres encore. Des guerres qui n’ont, au final, pour seul but que d’offrir, pendant un instant, un but à certains, mais qui au final ne changera pas grand-chose. On sent que l’auteur a mené des recherches.

On rencontre au fil des pages deux personnages qui se révèlent importants, le premier est bien entendu Sisyphe, dont le destin tragique de ressusciter régulièrement le marque aussi bien sur son corps que dans son esprit ; le second est Charon, le passeur vers le royaume des morts, qui ne peut le laisser faire ce voyage et doit ainsi le voir revenir indéfiniment. L’intérêt de ces deux protagonistes vient de leurs différences, leurs visions complètement opposés de la vie, Charon étant un peu le laquais des dieux, obéissant sans jamais poser de questions, là où Sisyphe est celui qui rejette les dieux, cherche à s’amener à leurs niveaux, apportant ainsi d’une certaine façon la destruction de l’ordre. Mais cette dualité est traitresse, car au fil des pages on se rend compte qu’ils sont aussi maudit l’un que l’autre, que, quel que soit le chemin qu’ils ont emprunté, ils se retrouvent, l’un et l’autre, bloqué à devoir rejouer la même scène indéfiniment un peu comme un disque rayé qui ne ferait que tourner en boucle. Le soucis, j’ai trouvé concernant les personnages, vient par contre du manque de chaleur et d’accroche, on a plus l’impression de suivre une pièce de théâtre que de véritablement vivre leurs péripéties. On s’intéresse à leurs malheurs, leurs souffrances, leurs idéaux, mais on n’est jamais complètement happé par eux, comme s’il manquait un petit quelque chose pour les rendre complètement humains. De plus Sisyphe parait un peu trop contemplatif, surtout une fois qu’il apprend la vérité, ce qui est dommage. Mais rien de bien gênant non plus.

Ce roman partait clairement pour être l’une de mes meilleures lectures de l’année jusqu’à environ la moitié du livre où j’ai commencé à légèrement décroché, à un peu moins me fasciner par ce que nous propose l’auteur et cela pour une raison toute simple. L’histoire se répète de trop. Certes c’est un peu le but du mythe, obligé de revivre indéfiniment une vie sans but et sans logique, mais voilà on a l’impression qu’il ne fait que se réveiller au milieu d’une bataille où seule l’époque et la technologie changent, où même les explications des hommes qu’ils rencontrent commencent à se ressembler. Ces répétions font alors qu’on voit alors les choses arriver à l’avance, qu’il y a moins de surprises, moins de rebondissements, on devine clairement le fil conducteur et la finalité du chapitre qui se dessine. Je ne sais pas si l’auteur avait en tête d’accentuer encore plus l’absurdité de la vie humaine, qu’on s’enferme dans les mêmes erreurs, les mêmes tourments encore et toujours, mais en tout cas j’ai trouvé que cette seconde partie perd un peu de son charme, malgré une conclusion sombre, mélancolique et qui, je trouve, se révèle réussie.

Au final on trouve quand même là un livre qui mérite d’être découvert et m’a offert un bon moment de lecture. Un roman qui demande aussi un minimum de concentration et de réflexion, donc si vous ne cherchez que le divertissement il vaut peut-être mieux passer votre chemin. En tout cas un roman qui confirme tout le bien que je pensais de Franck Ferric qui se positionne de plus en plus comme un auteur à suivre.

En Résumé : J’ai passé un bon moment de lecture avec ce nouveau roman de Franck Ferric qui nous propose de revisiter le mythe de Sisyphe de façon clairement intelligente, offrant ainsi au lecteur de nombreux axes de réflexions très intéressants sur la vie, son but, l’acceptation des autres ou encore l’utilité d’une guerre qui finalement n’apporte rien de vraiment concret vu que l’Homme y replonge régulièrement. Un récit qui ne laisse pas indifférent et soulève bon nombre de questions, le tout porté par une plume vraiment dense, magnifique, soignée et travaillée ainsi que par des dialogues percutants. La dualité entre Charon et Sisyphe ne manque pas non plus d’attrait, dévoilant ainsi deux visions d’une vie pour le même châtiment, même si j’ai trouvé qu’il manquait un petit quelque chose pour les rendre complètement attachants. Le principal regret que j’ai concernant ce roman c’est qu’au milieu du récit on en comprend la construction, il devient alors un peu répétitif, perdant un peu de son charme. Rien de non plus bloquant, mais qui l’empêche de se révéler excellent ce qui est dommage. Par contre, si vous ne cherchez que le divertissement passez votre chemin, ce roman demande un minimum de concentration. En tout cas l’auteur se positionne de plus en plus comme un auteur à suivre et je lirai sans soucis ces autres écrits.

 

Ma Note : 8/10

Métro Z – Fabien Clavel

metro zRésumé : Emma est excédée quand son métro reste bloqué à la station Châtelet. Déjà qu’elle doit s’occuper de Natan, son petit frère autiste… Quand une explosion retentit dans le wagon voisin, elle se rue, paniquée, dans les couloirs envahis par une épaisse fumée jaunâtre. Emma réalise que tous les accès sont condamnés et que Natan n’est plus avec elle ! Partant à sa recherche, elle observe le comportement étrange et terrifiant des autres passagers : indolents, marmonnant, les yeux dans le vague…

Edition : Rageot

 

Mon Avis : Il y a quelques semaines je me suis laissé tenter par la lecture de L’Évangile Cannibale, du même auteur, qui proposait une variation sur le thème des zombies clairement intéressante, dévoilant comme héros principaux des retraités et qui m’avait offert un très bon moment de lecture (ma chronique ici). Je me suis donc rapidement laissé tenter par son roman jeunesse, qui se situe dans le même univers et offrait un point de vue différent de cette invasion de zombies, en ayant hâte de voir comment l’auteur allait s’en sortir avec une lecture pour un public plus large. En tout cas l’illustration de la couverture nous met directement dans l’ambiance : il va falloir fuir.

Emma jeune lycéenne comme les autres, rentre chez elle avec son frère autiste dont elle s’occupe. Une explosion va alors complètement bouleverser ses plans, elle va se retrouver à fuir pour sa vie et très vite se rendre compte que les autorités ne laisse sortir personne. Pire, dans la panique elle a oublié son frère et doit alors le retrouver dans les méandres du métro avant d’espérer s’échapper. Ici, comme prévu par rapport L’Évangile Cannibale, on change complètement de décor, avec comme héroïne cette fois une lycéenne, mais aussi changement de trame, car on quitte le roman post-apocalyptique pour nous plonger au départ de la crise, au cœur même de l’incident. On se retrouve donc ainsi dans quelque chose d’assez classique sur le papier, avec la fuite en avant pour survivre de l’héroïne et ses amis, mais qui n’empêche pas à l’ensemble de se révéler plus que solide et efficace. L’auteur nous happe dès le début, nous immergeant dans l’action dès le second chapitre pour ne plus nous lâcher jusqu’à la conclusion. Le rythme est tendu et l’ambiance qui se dépeint au fil des pages est de plus en plus angoissante. Emma va devoir braver de nombreuses péripéties si elle espère s’en sortir. Le lecteur se retrouve alors à tourner les pages pour en découvrir plus et savoir ce qui va arriver aux héros.

L’univers qui se développe tout au long du récit se révèle assez efficace, nous dévoilant une France futuriste , où les médicaments sont monnaie courante et sont utilisés pour un rien, où les technologies, de plus en plus intrusives, ont évolué pas toujours en bien et où le pouvoir ne change pas et préfère se protéger que faire face à la crise. Là-dessus l’auteur développe aussi de nombreux axes de réflexions qui se révèlent efficaces, même si parfois traités de façon un peu trop simple. Il évite par contre de se mettre des limites, vis-à-vis de l’âge potentiel du lecteur, et traite de sujets d’actualités voir même de sujet graves. On se retrouve ainsi à réfléchir sur la liberté de la presse qui cherche plus facilement le larmoyant ou le sensationnel, l’acceptation des autres, l’influence des classes sociales dans la vie ou encore la maladie et plus particulièrement l’autisme qui, je trouve, est bien traité, offrant des parallèles originaux et permettant au jeune lecteur de mieux appréhender cette maladie. En tout cas une image de fond efficace qui ne laisse pas indifférent. L’auteur n’oublie pas pour autant qu’il est dans un roman de zombies et offre quelques scènes bien angoissantes et glaçantes ; pour un roman jeunesse j’entends bien.

 Concernant les personnages l’effort a clairement été fait pour éviter de tomber dans une certaine caricature voir même éviter d’offrir certains archétypes des héros de récit jeunesse. En effet les protagonistes qu’on découvre au fil des pages se révèlent humains, avec leurs forces et leurs faiblesses, dépassé devant les évènements, mais qui n’ont d’autres choix que d’avancer s’ils veulent s’en sortir. On se retrouve ainsi à s’attacher assez facilement et rapidement à Emma, adolescente en manque de reconnaissance depuis la naissance de son frère autiste, qui face à la crise qui apparait va alors se retrouver à faire des choix, parfois d’instinct, mais qui vont la forcer à changer, à avoir un nouveau regard. Mais c’est surtout par sa relation avec son frère qu’elle arrive, je trouve, à nous toucher, son évolution tout au long du récit, nous dévoilant au fil de flashback une relation compliquée, une tension entre eux, mais dont la crise et les conséquences qui en découlent vont les aider à se rapprocher, d’une certaine façon à mieux se comprendre et s’apprécier. Il faut ajouter à cela des personnages secondaires eux aussi intéressants et qui apportent des points de vues et des réflexions différentes.

Là où j’ai légèrement coincé dans ma lecture, c’est concernant certains passages qui se révélaient, à mon goût, un peu trop facile, dont la résolution était amenée un peu trop simplement. Alors je sais bien qu’un roman jeunesse n’aura pas la même complexité qu’un livre plus adulte, ne me faites pas dire ce que je n’ai pas dit, mais voilà, ici, j’ai trouvé que la fin s’offrait un peu trop de deus ex machina. C’est dommage car ça rend la conclusion un peu frustrante et quelques pages de plus pour s’offrir peut-être quelques rebondissements supplémentaires aurait pu apporter quelque chose en plus. Attention ça n’enlève en rien les qualités de l’histoire qui se révèle plaisante à lire et à découvrir, juste que ça l’empêche de passer un cran au-dessus.

La plume de l’auteur se révèle simple, efficace, entrainante et arrive à facilement capter le lecteur pour ne plus le lâcher, à travers cette ambiance dans les méandres de métro assez angoissante et surprenante. À noter aussi une sorte de supplément à la fin, intégré à l’histoire, qui retrace l’historique du zombie et qui offre aussi une comparaison avec les autres être fantastiques ; certes ça n’apprendra rien au fan du genre, mais ça permettra au néophyte d’en apprendre plus et je trouve l’idée réussie. Au final un roman jeunesse qui m’a offert une lecture très sympathique et qui se lit facilement malgré une conclusion un peu facile. En tout cas je lirai d’autres écrits de l’auteur sans soucis.

En Résumé : J’ai passé un moment de lecture très sympathique avec ce roman qui nous offre une histoire de zombies, certes classique sur la forme avec cette fuite en avant devant la catastrophe, mais qui se révèle efficace et entrainante. L’univers futuriste offert ici est solide et bien porté par de nombreuses réflexions, accessibles à tous et qui se révèlent prenantes et percutantes, que ce soit aussi bien sur la société que sur l’homme. L’auteur n’oublie pas non plus qu’il traite de zombies offrant des scènes angoissantes et une ambiance stressante ; pour un roman jeunesse j’entends bien. Les personnages évitent clairement de tomber dans la caricature ou dans l’archétype du héros jeunesse, pour se révéler humain et attachants. La relation entre Emma et son frère autiste est, je trouve, bien traité et son évolution apporte une touche sensible. Les personnages secondaires ne manquent pas aussi d’attraits et apportes des points de vues différents et intéressants. Mon principal regret viens que l’auteur s’offre, principalement sur la fin, un peu trop de facilité pour faire avancer son intrigue, rien de complètement gênant, mais un peu dommage je trouve. La plume se révèle simple et entrainante offrant, pour les jeunes et les moins jeunes, un roman de zombies agréable. Je lirai sans soucis d’autres écrits de l’auteur.

 

Ma Note : 7 /10

 

Autres avis : Cornwall, Lelf, Bibliocosme, AcrO, …

 

zombies challenge

Bird Box – Josh Malerman

Bird BoxRésumé : Malorie élève ses enfants de la seule façon possible: barricadés chez eux. Dehors, il y a un danger terrible, sans nom. S’ils s’aventurent à l’extérieur, ce sera les yeux bandés pour rester en vie.
S’ils ôtent leurs bandeaux, ils se donneront la mort avec une violence inouïe. Malorie a deux solutions: rester cachée avec ses enfants, isolée, ou bien entamer un terrifiant périple jusqu’au fleuve dans une tentative désespérée, presque vaine, pour rejoindre une hypothétique colonie de survivants. La maison est calme.
Les portes sont verrouillées, les rideaux sont tirés, les matelas cloués aux fenêtres. Les enfants dorment dans la chambre de l’autre côté du couloir. Mais bientôt, elle devra les réveiller et leur bander les yeux. Aujourd’hui, ils doivent quitter la maison et jouer le tout pour le tout.

Edition : Orbit

 

Mon Avis : Le premier point vraiment important avec ce livre c’est finalement d’apprendre qu’Orbit existe toujours et surtout que la maison d’édition publie. J’exagère un peu, mais il faut bien avouer que niveau communication depuis plusieurs mois c’est le calme plat. Les fans de Sanderson continuent d’ailleurs de s’en mordre les doigts à attendre la sortie de La Voie des Rois. C’est bien simple pour entendre parler de Bird Box il vaut mieux éviter le site d’Orbit sous peine de ne quasiment rien trouver. J’avoue je suis taquin, mettons-nous plutôt à parler du livre alors car, finalement, le résumé ne manque pas d’intérêt et la couverture possède un petit quelque chose d’attrayant qui donne envie de le découvrir.

L’histoire nous propose, ici, de suivre deux lignes temporelles, la première est celle post-apocalyptique ou le monde s’est écroulé face à l’apparition de monstres dont on ne sait rien, mis à part que dès que quelqu’un en voit une il devient fou au point de tuer n’importe qui aux alentours puis se suicider. Les population se retrouvent donc obligés de survivre les yeux bandés et d’éviter toutes intrusions chez eux sans de nombreuses procédures de vérification. Malorie a survécu pendant quatre ans dans une maison avec ses deux enfants et décide de tout quitter à la recherche d’un groupe de survivants ; son dernier espoir. À côté de cela l’auteur développe une ligne de flashback liés à l’héroïne qui nous dévoile le monde juste avant l’apocalypse, sa lente descente dans la folie et la fin de la civilisation. Sur le papier il y avait de quoi me plaire et m’offrir une histoire des plus stressantes, entrainantes et pourtant au final je dois bien avouer que je n’ai pas complètement été convaincu. L’ensemble reste agréable à lire, offre un bon divertissement angoissant, mais il n’a pas répondu à toutes mes attentes.

L’idée de base se révèle pourtant clairement originale : imaginer un monde où on devrait tous se passer de la vue, qui est quand même le sens sur lequel se repose le plus l’Homme, sous peine de mourir. Cela offre donc de nombreuses possibilités. D’ailleurs l’auteur en profite de façon percutante pour nous offrir une montée en tension haletante au fil des pages, passant d’un monde tel qu’on le connait vers un huis-clos, certes classique dans ce genre de livres, mais efficace de survivants dans une maison. Il s’amuse alors avec le lecteur, jouant sur son imagination et ses frayeurs les plus profondes liés au fait que sans la vue on se retrouve dans le noir, simplement guidé par ses autres sens souvent moins développés. Mais voilà, comment savoir que ce qu’on entend, ce que l’on sent ou ce qu’on touche se révèle être vraiment ce que l’on pense ? C’est justement avec l’inconscient du lecteur que l’intrigue joue, ne définissant jamais de façon claire la menace, quand chaque bruit, chaque mouvement peut finalement amener l’horreur. on se retrouve alors happé, tendu par ce qui peut arriver et donc on attend le dénouement pour reprendre notre souffle tout en sachant que le prochain chapitre apportera son lot de stress et de malaise. C’est vraiment le gros point fort du récit, cette capacité à offrir des passages qui jouent sur les peurs les plus primales du lecteur et qui, je pense, en fera frissonner plus d’un, au lit, avec juste une lampe de chevet avant d’aller se coucher.

Mais voilà ce livre ne cherche pas qu’à nous faire peur il offre aussi une réflexion, classique dans ce genre de romans, mais efficace et bien traitée, sur cette humanité qui s’effondre dévoilant ainsi le pire, comme le meilleur, chez les uns et les autres. Chacun se retrouve à faire des choix, guidé par ses craintes. Le monde post-apocalyptique qu’il trace au fil des pages offre son lot de mystères, laissant la part belle à l’esprit du lecteur pour le deviner, l’imaginer, car comment décrire un monde qu’on ne voit pas et qu’on ne doit surtout pas regarder sous peine de mourir. Cette liberté du lecteur, qu’on retrouve sur pas mal d’aspects, pourra peut-être en surprendre plus d’un, mais j’ai trouvé que cela apportait un véritable plus. Parfois à trop vouloir définir les monstres ou l’univers l’ensemble perd alors de son côté angoissant. Ici, chacun s’imagine ce qu’il veut et chacun voit les atrocités qu’il a envie de voir. Alors attention, l’auteur ne laisse pas le lecteur tout faire, certaines scènes très visuelles apportent leur lot de frissons et d’abomination.

Alors qu’est ce qui m’a dérangé au final dans ce livre, me demanderez-vous? C’est bien simple j’ai trouvé que les deux lignes temporelles n’avaient pas le même intérêt. Autant celle liée aux flashbacks, qui nous dévoile cette humanité qui plonge dans la folie et dans les pires actions, se révèle passionnante et stressante autant celle où Malorie tentant de retrouver un groupe de survivants a eu du mal à complètement me passionner. Dès le début j’avoue j’ai bloqué sur un point, peut-être idiot, mais qui m’a perturbé : remonter 30km de rivière avec une barque, avec deux enfants qui ne savent pas nager et le tout les yeux bandés. On oublie donc facilement tout ce qui est débit, courant et fond du lit de la rivière qui sont autant d’éléments qui peuvent vous renverser voir vous couler. Alors après discussion je peux comprendre que par survie on se lance dans des plans désespérés, mais pour un plan qu’elle travaille depuis des années j’ai trouvé cela bancal. Mais bon ce n’est qu’un point, car finalement ce qui m’a le plus dérangé avec cette ligne d’intrigue c’est qu’au final, il ne se passe pas grand chose. L’ensemble est linéaire et parait tellement facile qu’il en perd une grande partie de son côté aventure et donc de son intérêt. Un peu plus de rebondissements vraiment surprenants auraient apporté un plus je pense.

Ensuite un des autres aspects qui m’a laissé mitigé ce sont les personnages. Comme je l’ai déjà dit ils arrivent vraiment bien à retransmettre au lecteur leurs peurs et leurs angoisses, là dessus aucun souci. Le huis-clos qui nait quand ils se retrouvent à plusieurs enfermés dans la maison leur offre aussi des moments de doute et de réflexion, sur leurs relations avec les autres et les choix à faire, intéressants. Le problème vient plutôt du moment où l’auteur cherche à leur offrir des sentiments, principalement le sentiment d’amour, d’amitié, qui, je trouve, ne transparait jamais. C’est bien simple la relation entre Malorie et Tom ne m’a jamais paru cohérente, ni attachante. Concernant la relation de l’héroïne avec ses enfants, là, cela m’a paru encore plus frappant. On sent que l’auteur a lu La Route, reprenant l’idée d’éviter les noms, le monde n’ayant pas obligatoirement d’avenir, un nom n’apporte donc rien. Mais contrairement à McCarthy qui offrait une certaine sensibilité et de l’émotion à travers les non-dits entre le père et le fils, ici je n’ai jamais rien ressenti. L’héroïne donne même l’impression de les garder auprès d’elle plus pour leurs ouïes plus développées que la sienne qu’autre chose, tant elle ne leur offre jamais un seul minuscule compliment ou même l’impression de les aimer. Pire vu qu’elle a un garçon et une fille elle se doit de les différencier, donc elle les appelle Garçon et Fille. Franchement elle aurait pu les appeler Fer à Repasser et Motoculteur ça aurait été pareil. C’est dommage je trouve.

Concernant la plume de l’auteur malgré le fait qu’il ait un peu de mal avec les passages un peu plus émotionnels, elle se révèle finalement fluide, entrainante et sait surtout offrir des scènes effrayantes et pleines de tourments. La conclusion qui est offerte se révèle plutôt efficace, avec quelques révélations intéressantes et ce malgré une certaine facilité. Elle laisse aussi de nombreuses portes ouvertes soit pour revenir dans l’univers, soit pourquoi pas laisser libre court à l’imagination du lecteur. Au final la lecture s’est révélée sympathique remplissant parfaitement son rôle de livre angoissant, mais voilà j’ai trouvé dommage que niveau émotion ce soit le calme plat, quelques défauts ici ou là empêchant d’offrir plus qu’un simple divertissement et laissant un léger sentiment d’incomplet. En tout cas si l’auteur revient dans son monde, je le lirai tout de même avec plaisir histoire d’en apprendre plus.

 En Résumé : J’ai passé un moment de lecture sympathique avec ce livre qui se révèle effrayant par certains aspects mais qui n’a pas non plus réussi à totalement me convaincre. L’auteur construit deux lignes d’intrigue une au moment de l’apocalypse et une quatre ans après, et autant la première m’a happé, autant j’ai trouvé la seconde très linéaire et sans véritable surprise. L’ensemble se révèle pourtant angoissant, jouant avec les peurs les plus enfouies du lecteur, lui retirant la vue pour s’amuser avec ses autres sens. L’univers post-apo ne manque pas d’intérêt et laisse souvent la possibilité à la personne qui lit de se faire son propre avis, sa propre vision. Mais voilà là où le roman pêche, selon moi, c’est quand l’auteur cherche à créer des liens entre les personnages. Que ce soit la relation de Malorie avec Tom ou avec ses enfants je n’ai jamais rien ressenti. Pire j’ai même trouvé qu’elle donnait plus l’impression de considérer ses gosses comme de simples objets. La conclusion se révèle assez agréable, malgré quelques facilités, mais laisse de nombreux points en suspens pour, pourquoi pas, y revenir dans un autre récit. La plume de l’auteur se révèle simple, fluide et entrainante malgré sa difficulté à offrir de l’émotion. En tout cas si l’auteur écrit une suite je serai curieux de la lire pour voir vers quoi il va aller.

 

Ma Note : 6,5/10

 

Autres avis : Cajou, fangtasia, Dup, Cornwall, …

Testament Tome 1, L’Héritière – Jeanne-A Debats

l'heritiereRésumé : Je m’appelle Agnès Cleyre et je suis orpheline. De ma mère sorcière, j’ai hérité du don de voir les fantômes. Plutôt une malédiction qui m’a obligée à vivre recluse, à l’abri de la violence des sentiments des morts. Mais depuis le jour où mon oncle notaire m’a prise sous son aile, ma vie a changé. Contrairement aux apparences, le quotidien de l’étude qu’il dirige n’est pas de tout repos : vampires, loups-garous, sirènes… À croire que tout l’AlterMonde a une succession à gérer ! Moi qui voulais de l’action, je ne suis pas déçue… Et le beau Navarre n’y est peut-être pas étranger.

Edition : Actu SF

 

Mon Avis : Il y a quelques années Jeanne-A Debats se lançait dans le roman de vampire avec Métaphysique du Vampire et son héros charismatique, captivant, plein d’humour noir : Navarre. J’ai été rapidement accroché par ce vampire, par sa vision de la vie et par ses aventures. Il faut dire que l’auteur lui en fait voir de belles à travers les nombreuses autres nouvelles qu’elle lui a consacrées. Vu que j’ai toujours bien accroché à ces récits, plein de mordant et de rebondissements, c’est sans surprise que j’ai rapidement fait rentrer ce livre, qui se place dans le même univers, dans ma bibliothèque. À noter la couverture, illustrée par Damien Worm, que je trouve très réussie avec son côté sombre. Ce livre possède aussi une préface d’Adrien Party et une Postface de Jean-Luc Rivera.

On découvre ici Agnès, une demi-sorcière, de par sa mère, qui a le don de voir les fantômes, ce qui au final lui pourrit bien la vie et la force à vivre recluse dans sa maison. Elle n’a quasiment jamais croisé l’Alter-Monde, sa mère ayant décidé de se marier à un humain et de s’éloigner de tout cela, mais tout va changer suite à un accident qui va la rendre orpheline. Elle va alors être récupérée par son oncle qui va lui offrir un emploi et lui faire découvrir un monde complètement différent.

Alors oui, première surprise, ici le narrateur n’est plus Navarre mais Agnès. C’est d’ailleurs légèrement frustrant de retrouver Navarre en personnage secondaire, de ne plus découvrir sa répartie, ses nombreuses réflexions et explications, mais simplement le voir à travers l’héroïne. Mais pourtant ce n’est pas non plus une mauvaise chose, permettant clairement d’amener un nouveau point de vue, d’éviter aussi de tomber dans l’ennui du personnage qu’on connait par cœur. Surtout que finalement, Agnès se révèle être une héroïne terriblement attachante par son côté humain, normale, avec ses forces et ses faiblesses. Elle va devoir affronter tout un nouveau monde qui s’ouvre à elle, mais tout en essayant de garder sa propre personnalité et son indépendance.

Elle va surtout se retrouver très bien entourée, retrouvant ainsi son oncle Géraud ayant traversé les siècles, conservateur terriblement puissant et qui a parfois du mal à se faire complètement au nouveau monde et ses mœurs, mais aussi Navarre qu’on ne présente plus toujours aussi charismatique et intéressant malgré qu’il soit un peu plus en retrait, ou bien encore Zalia, la sirène, personnage complexe qui lutte contre ce qu’elle est et cherche à vivre une vie à peu près normale. Même les personnages secondaire se révèlent travaillés et passionnants à découvrir, l’auteur offrant ainsi une palette de protagonistes tous plus efficace les uns que les autres. Au final ce qui les rend aussi très intéressants c’est qu’ils sont loin de tout manichéisme, il n’y a ni véritables gentils ni de grands méchants, juste des personnes possédant leurs propre visions de la vie avec leurs envies et leurs souffrances.

À partir de là l’auteur va construire une intrigue de fantasy urbaine, certes faisant un peu office de tome d’introduction, mais qui va se révéler terriblement efficace, prenante et passionnante. Par tome d’introduction je n’entends rien de péjoratif, juste que le récit peut être séparé en deux parties. Une première qui permet clairement de poser les personnages et l’univers de façon dense, soignée et percutante le tout avec plein d’humour et de révélations sur cette vision complètement différente de Paris. Puis une seconde partie qui vient offrir un fil rouge à ce premier tome avec cette histoire de succession qui va se révéler sans temps mort, pleine de rebondissements et de surprises avec son lot d’action aussi. Dans l’ensemble on se retrouve avec un livre maîtrisé, bien rythmé, qui ne se révèle jamais ennuyeux, plein de fantaisie (comment ne pas rire devant certaines situations ou certaines explications), de coups de théâtre, de frissons et qui n’oublie pas d’être intelligent nous offrant à travers certains passages et certaines piques des réflexions perspicaces sur des sujets d’actualité comme par exemple la liberté de chacun. À noter aussi le terrible coup de force, pour moi en tant que lecteur, d’offrir des personnages féminins qui parlent régulièrement maquillage, chaussure, mode et vêtements le tout de façon fluide et sans avoir jamais réussi ni à m’ennuyer ni à me perdre, je dis chapeau.

 Concernant l’univers qui est développé au fil du récit il se révèle clairement fascinant et solide. L’auteur utilise comme image de fond la ville de Paris et lui offre une aura de mystère et de magie qui ne manque pas d’attrait donnant envie d’en apprendre plus à travers des descriptions de lieux et d’édifices assez envoutantes. L’aspect historique est aussi bien présent et apporter vraiment un plus dans la construction du monde mis en place, principalement dans la caractérisation de ses « monstres » qui se révèlent finalement très liés à l’histoire de France et plus précisément à celle de sa capitale.

Les créatures qu’on y rencontre justement restent assez classiques avec sorciers, loups-garous, vampires, etc… mais ne manquent pas d’attraits principalement dans leur construction sociologique ou encore leurs coutumes. C’est franchement là-dessus qu’ils se révèlent captivants à découvrir, dans leurs interactions et leurs façons de voir le monde qui les entoure. Le point original du récit vient aussi de cette idée de cabinet notarial, imaginer que les êtres mystiques doivent obligatoirement se frotter à la loi à travers des notaires qui restent toujours neutres se révèle assez intriguant et offre des perspectives assez vastes pour d’autres récits. Vient aussi tous les mystères qui entourent l’héroïne et  dont les indices sont lâchés au compte-goutte pour mieux nous happer. Mais l’auteur n’oublie pas pour autant l’aspect humoristique, chaque caste ne manquant pas de mordant comme par exemple la scène avec Azraël qui offre son lot de rire. Au final un monde qui donne clairement envie de revenir.

La plume de l’auteur se révèle efficace, subtile et entrainante, poussant le lecteur à tourner les pages avec plaisir pour en découvrir toujours plus. Entre action, références, ironie et aventures ce livre se révèle être un condensé parfaitement maîtrisé du début à la fin. Je regretterai peut-être juste une conclusion de l’intrigue somme toute assez prévisible, mais cela ne gâche en rien la lecture de ce tome. Ce premier volume peut se lire de façon indépendante, mais laisse assez de portes ouvertes pour pouvoir y revenir à travers d’autres textes. J’ai passé un excelle moment de lecture avec ce roman et je lirai sans problème et avec plaisir d’autres écrits dans cet univers.

En Résumé : Au final ce livre m’a offert un excellent moment de lecture nous offrant une histoire de fantasy urbaine efficace, percutante et sans temps mort dont on tourne les pages avec plaisir. On retrouve ici clairement un tome d’introduction avec une présentation de l’univers qui se révèle fascinant à découvrir avec une ville de Paris remplie de mystères et des créatures fantastiques solides et intrigantes, mais aussi une intrigue pleine de surprises et de rebondissement. Les personnages se révèlent attachants et surtout terriblement humains ce qui fait qu’on s’accroche rapidement à eux, malgré une légère frustration de ne retrouver Navarre qu’en personnage secondaire. L’humour se révèle très présent et offre ainsi un vernis de légèreté qui apporte un véritable plus à l’ensemble avec des scènes comiques au possible. La plume de l’auteur est  fluide, entrainante et subtile ce qui fait que le lecteur tourne les pages avec plaisir et sans jamais s’ennuyer. Je regretterai peut-être juste une conclusion de l’intrigue assez prévisible, mais cela ne gâche en rien la lecture. Je lirai avec grand plaisir d’autres écrits dans cet univers.

 

Ma Note : 8,5/10

L’Evangile Cannibale – Fabien Clavel

l'evangile cannibaleRésumé : Aux Mûriers, l’ennui tue tout aussi sûrement que la vieillesse. Matt Cirois, 90 ans et des poussières, passe le temps qu’il lui reste à jouer les gâteux. Tout aurait pu continuer ainsi si Maglia, la doyenne de la maison de retraite, n’avait vu en rêve le fléau s’abattre sur le monde. Et quand, après quarante jours et quarante nuits de réclusion, les pensionnaires retrouvent la lumière et entrent en chaises roulantes dans un Paris dévasté, c’est pour s’apercevoir qu’ils sont devenus les proies de créatures encore moins vivantes qu’eux. Que la chasse commence…

Edition : Actu SF

 

Mon Avis : Comme depuis quelques années maintenant Plumeline s’est mis dans la tête, lors du festival des Imaginales, de me faire repartir avec un livre qu’elle a sélectionné avec son petit déambulateur ( 😀 ). Finalement cette année sous ses argumentations et recommandations je suis reparti avec deux livres dont cet Évangile Cannibale. Il faut aussi bien avouer qu’il ne pouvait que finir dans ma PAL, un mélange de zombies et de papys a le don de me questionner et je me demandais bien ce qu’allait pouvoir proposer l’auteur. À noter la couverture, illustrée par Diego Tripodi, qui se révèle sympathique et efficace.

Alors clairement ce livre ne révolutionnera pas le roman de zombies en général, nous proposant une infection qui parait lié à ce qu’il parait être un problème pharmaceutique et qui a amené le retour des morts-vivants. Non, là où l’auteur trouve l’originalité c’est plutôt dans la façon dont il présente les choses, pas de héros sur son cheval blanc, pas de sauveur baraqué, pas de groupe plein de vivacité, ici nos survivants sont tout simplement une bande de vieillard coincé dans une maison de retraite qui vont découvrir l’apocalypse. Imaginez alors des courses poursuite à 2 à l’heure entre un zombie qui se traine et un fauteuil roulant électrique, voilà l’idée qu’a trouvé l’auteur pour son récit et je dois bien avouer qu’elle accroche clairement se révélant efficace, percutante et surtout pleine de dérision.

L’auteur se met alors à construire son récit un peu en deux grandes parties avec une première qui pose l’histoire, les personnages et l’univers de cette maison de retraite, le tout de façon ironique, rempli d’humour noir et de cynisme, bien porté par les réparties incisives du narrateur et avec une petite dose de mystique. L’auteur manipule ici l’humour au Xème degré de façon captivante et on ne peut s’empêcher de sourire voir même de rire devant certains passages francs et sans concessions. Puis au fil des pages la tension commence à monter, nos héros quittent la maison de retraite pour rejoindre Paris et découvrir alors que les zombies ont pris le pouvoir, que la ville est cloisonnée. Ils se lancent alors dans une (lente) course-poursuite pour la survie qui se révèle sanglante, surprenante et terriblement efficace. On atteint d’ailleurs le paroxysme de l’horreur, de la folie et de l’angoisse suite à la rencontre avec Manon. On se rend compte alors que quel que soit l’âge des gens, quand la survie prime, que la folie apparait, alors le travail de groupe devient de plus en plus compliqué, chaotique et impossible. L’Homme est un loup pour l’Homme, même chez les anciens. Que ce soit la première ou la seconde partie j’ai été captivé du début à la fin par ce roman  sans temps morts, rempli de rebondissements le tout bien porté par un format assez court (un peu moins de 300 pages) proposant ainsi un rythme haletant.

Mais ce roman est aussi bien plus qu’un divertissement réussi et plein d’humour, il se révèle aussi intelligent, offrant de nombreux axes de réflexions comme par exemple sur la façon dont on traite nos anciens, le culte de la jeunesse et de la beauté, le consumérisme, la vie qu’on brûle par les deux bouts sans prendre le temps de se poser ou bien encore plus simplement la capacité de l’humanité à s’autodétruire. Un roman qui, une fois la dernière page tournée, s’est révélé beaucoup plus psychologique qu’il le laissait présager initialement. Alors certes l’ensemble cherche parfois un peu trop le percutant, balançant des idées sans complètement les développer et certains aspects manquent de complexité ou de densité, mais l’ensemble ne manque pas d’attrait et permet d’élever ce roman a plus qu’une simple histoire de survie.

L’une des grande réussite du roman vient aussi du narrateur, Matt Cirois, 90 ans en fauteuil roulant, qui au départ représente un peu le vieux râleur, jamais content et toujours à se plaindre, à insulter, mais un petit peu attachant par son côté bougon. Puis au fil des pages on se rend compte qu’il n’est finalement pas si fiable que cela, paranoïaque, la folie et le doute commencent alors à le prendre, mais aussi finalement à prendre le lecteur. Comment croire ce que raconte le héros quand il se met à raconter que n’importe qui conspire contre lui? qu’il se met à mentir? L’auteur arrive franchement à rendre ce personnage intéressant à suivre et à découvrir, on est loin de s’attacher à lui (sauf à aimer les personnages pourri jusqu’à la moelle) tant il se révèle cynique, salaud et psychopathe, mais il fascine clairement. Surtout il arrive à rendre cette folie palpable, angoissante et cohérente, montant lentement en tension au fil de la lecture.

 Le titre du livre n’est pas non plus anodin, l’auteur nous présente son récit comme un évangile, certes vicié au vu de ce que représente le narrateur, mais tout de même un évangile avec son messie et ses apôtres. D’ailleurs l’interview de l’auteur à la fin du roman permet aussi de découvrir énormément d’aspects que je n’avais pas obligatoirement vu dans la construction du roman. En tout cas le style se révèle efficace, jouant même parfois avec l’écriture ainsi qu’avec la vérité et le lecteur, pour mieux le surprendre. Au final un roman de zombies qui dépasse le simple divertissement mélangeant à la fois humour, sanglant et réflexion et qui m’a clairement donné envie de lire d’autres écrits de l’auteur. D’ailleurs je pense faire entrer Métro Z dans ma PAL, son roman jeunesse sur les zombies.

En Résumé : J’ai passé un très bon moment avec ce roman qui, certes, ne révolutionnera pas l’idée des zombies, mais se révèle original par son contexte, offrant un groupe de vieillard en survivant. L’ensemble ne manque ni d’humour ni de cynisme et n’oublie pas pour autant d’offrir un aspect angoissant, sanglant et violent avec une tension qui monte lentement au fil des pages. Le narrateur, grand-père acariâtre et râleur possède un petit côté attachant au début, puis très vite on découvre qu’il ment, qu’il cache des choses, que la folie le guette et le rend de plus en plus salaud ce qui le rend, certes beaucoup moins attachant, mais intéressant à suivre tant l’auteur arrive à le rendre crédible. Cela force aussi le lecteur à toujours remettre en cause ce qu’il dit, à essayer de démêler le vrai du faux ce qui apporte un véritable plus. Ce roman se révèle aussi être plus qu’un simple divertissement, l’auteur nous offre de nombreux points de réflexions, certes parfois un peu simplistes, mais qui se révèlent efficaces. L’auteur s’offre aussi un véritable exercice de style dans sa façon de raconter l’histoire que ce soit dans la présentation tel un évangile ou encore dans sa façon de jouer avec le lecteur. Au final un assez court roman, clairement efficace et entrainant, qui me donne envie de lire d’autres romans de l’auteur.

 

Ma Note : 8/10

 

Autres avis : Cornwall, boudicca, Sita, Tesrathilde, Nymeria, Radicale, Lune, etc…

 

zombies challenge

Page 12 of 21

© 2010 - 2024 Blog-o-Livre