Résumé : Le roman sur la vie d’Hildegarde de Bingen et son époque Religieuse, visionnaire, scientifique, poétesse et compositrice, l’abbesse Hildegarde de Bingen n’a cessé, depuis sa mort, d’inspirer femmes et hommes. Figure totale du Moyen-âge européen, elle déborde des limites du 12è siècle et de la vallée Rhin où elle vécut : depuis sa berge de fleuve, entre Mayence et Cologne, Hildegarde rayonne sur l’univers entier. Née au moment où la première Croisade arrive à Jérusalem, elle meurt tandis que naissent les premiers chevaliers de romans. À son expérience de femme de pouvoir, son œuvre mêle observations et visions, unissant sous une même énergie vitale les mondes réels, imaginaires et divins. Léo Henry crée, autour de Hildegarde, un livre-monde qui emprunte ses formes autant au récit épique, qu’à l’hagiographie ou au roman picaresque. Une fresque, qui court de la création du monde à l’Apocalypse, et explore l’intrication du temps qui passe et des histoires que nous nous racontons.
Edition : La Volte
Mon Avis : De Léo Henry, j’ai déjà lu plusieurs de ces livres, que ce soit ses romans ou bien encore ses recueils de nouvelles. J’ai toujours trouvé que l’auteur possédait une imagination particulière et originale, le tout porté par une plume efficace et envoutante. Alors parfois, il m’arrivait de passer à côté d’un texte, mais je trouve toujours qu’il y avait quelque-chose qui se dégageait de ses écrits. Pour autant je ne savais pas trop si j’allais me laisser tenter par ce Hildegarde, la vie de la sainte ne m’intéressant pas obligatoirement. Pour autant, lors des dernières Imaginales et après une discussion avec l’auteur j’ai quand même décidé de tenter ma chance avec ce livre et de voir ce qu’il allait proposer. Concernant la couverture, je la trouve sobre et très réussie, attirant facilement le regard.
Contrairement à ce que l’on pourrait croire, ce livre ne va finalement pas nous conter la vie d’Hildegarde. On est ainsi loin d’une simple biographie. D’ailleurs, au final, il ne s’agit pas d’un roman, mais d’un recueil de textes qui ont tous comme référence plus ou moins prononcée Hildegarde. Certains textes nous présente alors clairement la religieuse, là où d’autres ne font que la citer ou la représenter de façon très lointaine et offre plus une transcription, une vision de l’époque. Comme le présente l’éditeur, on plonge ainsi dans un livre-monde, qui va nous plonger plus à la découverte d’une fraction temporelle de l’Histoire que dans la vie d’une simple personne. Cette construction m’a d’ailleurs plus captivé, car je ne suis pas sûr que j’aurais obligatoirement accroché à une biographie de la religieuse. Car oui, au final, j’avoue avoir passé un très bon moment de lecture avec ce livre qui s’est révélé rapidement prenant, captivant et entraînant, se révélant fluide, soignée et riche.
On plonge ainsi dans un kaléidoscope de récits, que ce soit de l’intimiste, de l’épopée, de la légende, des contes, des voyages, des aventures et bien d’autres encore, l’auteur variant clairement ses textes et offrante à chacun un ton qui lui est propre. On sent, d’une certaine façon, que Léo Henry s’amuse dans la construction de ce recueil, cherchant ainsi à proposer à chaque fois quelque-chose de différent, mais sans pour autant se perdre, manquer de conviction ou ennuyer le lecteur. C’est un véritable travail d’écrivain, je trouve. D’une certaine façon il s’est mis des contraintes, que ce soit dans la construction déchronologique du livre, la variation des narrations et des constructions, ou bien encore dans son fil rouge ténu. Pour autant il s’en sort très bien et de façon très efficace, selon moi, offrant une sorte d’OLNI que j’ai apprécié découvrir. Ainsi chaque récit possède une force, une puissance qui lui est propre qui fait que je me suis retrouvé à chaque fois facilement emporté et fasciné. De plus on sent bien que l’auteur travaille son texte depuis un petit moment, il y a une certaine maîtrise qui se dégage dans la plupart des textes, une certaine fluidité, trouvant régulièrement le ton juste et transformant chaque nouvelle en quelque-chose d’unique.
Un point que j’ai noté aussi, au fil des pages, c’est que Léo Henry a dû énormément travailler son sujet, mener de nombreuses recherches pour construire sa toile de fond, nous plonger de façon si vivante et réaliste dans cette époque de croisades, de « magie », de pouvoirs et de religion. D’une certaine façon, cela vient peut-être du fait qu’il est un auteur d’imaginaire, on a plus l’impression de découvrir une Légende retranscrite dans une époque à la fois lumineuse, mais aussi extrêmement sombre avec sa violence, sa souffrance, ses troubles, ses morts. On est clairement dans une autre époque, qui ne dépayserait pas dans un roman de Fantasy, mais qui pourtant est finalement notre passé, que ces textes viennent donner, d’une certaine façon, vie devant nos yeux. Il faut dire que la plume de Léo Henry joue aussi énormément se révélant soignée, riche, envoûtante et nous offrant une plongée très visuelle et éclatante dans une toile de fond assez fascinante. Attention il ne transforme pas non plus cette époque en « paradis », il montre clairement que le Moyen-Âge peut être cruel, mais il construit quelque-chose de cohérent, de logique et de réaliste. A travers ses différents narrateurs, ses différentes rencontres on découvre aussi une toile assez marge et dense que ce soit d’un point de vue historique, politique, religieux ou encore social.
Hildegarde au milieu de tout cela, même si elle n’est pas toujours très présente, sauf deux textes où elle en est l’héroïne, en devient ainsi d’une certaine façon le fil rouge de chacun de ces textes. C’est une sorte de jeu de piste que construit l’auteur, un puzzle où chaque indice se répond pour tenter, non pas obligatoirement de tracer le portrait de cette religieuse, même si c’est en partie le cas, mais plutôt d’en voir son influence sur son époque et aussi le monde dans lequel elle vivait. Tout du long on a par conséquent l’impression de tourner autour de cette héroïne, sans jamais vraiment réussir à l’approcher et pourtant plus on avance, plus on en découvre. Surtout, ce qui m’a fasciné dans ce roman, ce n’est pas obligatoirement Hildegarde elle-même, mais les nombreux personnages que l’on croise tout du long, ce fourmillement de gens en quêtes de bouleversements, d’intellectuels qui sont toujours à la recherche d’évolutions, de nouveauté, qui cherchent à améliorer leurs connaissances, à tenter de mieux comprendre le monde. Il y a, d’une certaine façon je trouve, un hommage à ses hommes et ses femmes qui se sont lancés dans une quête de connaissance, qui montre aussi que l’époque n’était pas qu’obscure et barbare.
Pour autant tout n’est pas parfait non plus dans ce livre, il souffre un peu de ce que l’on peut reprocher souvent dans un recueil : que tous les textes ne sont pas au même niveau. Ainsi sur les neuf textes que composent ce livre, je n’ai que moyennement accroché au Lapidaire qui m’a en parti laissé de côté et j’ai trouvé Mayence un peu trop long par moment, tournant en rond dans son enchâssement d’histoires. Parfois aussi j’ai senti que l’auteur a fait tellement de recherches pour son livre, que je me retrouvais perdu dans l’Histoire. Certes j’adore quand un livre me pousse à faire des recherches, ce qui fût de nombreuses fois le cas ici, pour autant parfois j’avais l’impression que c’était de trop, mais c’est plus un avis finalement personnel qui met en avant surtout mes lacunes sur mes connaissances de l’époque. Au final Hildegarde m’a offert un très bon moment de lecture, et même si certains textes s’essoufflent je suis content de l’avoir découvert. Par contre, j’aurai du mal à le conseiller tant c’est le genre de livre qui peut autant captiver que bloquer, à vous de vous faire votre avis.
En Résumé : J’ai passé un très bon moment de lecture avec Hildegarde de Léo Henry, qui évite de tomber dans l’autobiographie pour nous construire un patchwork de récit qui nous font découvrir aussi bien la religieuse, son époque et aussi son influence. On se retrouve ainsi à plonger dans un recueil de récit qui vont rapidement se révéler fluide, entrainant, globalement maîtrisés et surtout fascinant. On sent que l’auteur a fait de nombreuses recherches pour retranscrire de façon cohérente, logique et, d’une certaine façon, captivante cette époque à la fois lumineuse et sombre. Entre croisade, guerres, luettes de pouvois, récits intimistes l’auteur s’amuse, offrant à chaque nouveau texte un ton et une voix qui lui sont propres sans jamais se perdre ou devenir répétitif. Hildegarde devient ainsi le fil rouge du recueil, une sorte de puzzle ou chaque indice se répond pour nous offrir une image plus grande. On découvre ainsi de nombreux personnages amoureux de la connaissance, du changement, des protagonistes en quête de connaissances qui montre que l’époque n’était pas qu’obscure et barbare. Maintenant tous les textes ne sont pas obligatoirement au même niveau, Le Lapidaire m’ayant laissé en partie de côté par exemple ou encore Mayence que j’ai trouvé trop long. La plume de l’auteur est soignée, riche, envoutante et captivante, plongeant facilement, je trouve, le lecteur dans ses récits. Au final j’ai passé un très bon moment avec ce livre, pour autant j’aurai du mal à le conseiller tant je sens que c’est le genre de texte qui peut accrocher autant que laisser de côté. A vous de vous faire votre avis si vous êtes intéressé.
Ma Note : 8/10
Autres avis : Just a Word, …
L'ours inculte
Effectivement ça a l’air d’un OLNI ce Hildegarde. Il me tente mais en même temps j’ai peur. Petit coup de poker littéraire.
BlackWolf
C’est exactement ça. Pour ma part ce fût un coup de poker gagnant, maintenant ça dépendra de chacun.
leschroniquesduchroniqueur
Il faudra que je le lise, histoire de découvrir la plume de l’auteur ^^ !
BlackWolf
Alors je ne sais pas si Hildegarde est le meilleur roman pour découvrir la plume de l’auteur il reste quand même un livre un peu particulier selon moi.
leschroniquesduchroniqueur
Je vois… Tu me conseillerais lequel pour commencer ? 🙂
BlackWolf
J’ai bien aimé Sur Le Fleuve écrit à 4 mains, sinon si les nouvelles ne te dérange pas tu peux facilement trouver de quoi te faire un début d’avis sur son imaginaire. J’ai La Panse aussi dans ma PAL dont j’ai vu de bons retours.
leschroniquesduchroniqueur
D’accord, merci beaucoup ! 🙂