Catégorie : Fantasy Page 32 of 69

Fées, Weed & Guillotines : Petite Fantasie Pleine d’Urbanité – Karim Berrouka

fees, weed & guillotinesRésumé : La dernière fois que Jaspucine a mis un pied dans le monde des hommes, elle en a littéralement perdu la tête : la Révolution française n’a pas été une période très profitable pour les créatures féeriques. Sauf pour Zhellébore, l’enfoirée qui l’a envoyée à l’échafaud. La vengeance étant un plat qui se mange froid, Jaspucine est bien décidée à retrouver la traîtresse. Même si pour cela elle doit s’attacher les services d’un détective. Mais à force de remuer ciel et terre, c’est sur une conspiration bien plus grande que la fée et l’enquêteur vont tomber.

Edition : Actu SF

 

Mon Avis : Ce roman n’a pas fini par hasard dans ma PAL, a force d’en entendre parler, souvent en bien, depuis sa sortie je me suis laissé intriguer.  Présenté comme un roman noir, mais à l’humour qui parait déjanté, je ne pouvais que le faire entrer dans ma bibliothèque, ce qui fut chose faite lors des dernières Imaginales. De plus la nouvelle écrite par l’auteur dans l’anthologie Lancelot (chronique ici) et qui reprenait des personnages du livre, m’a encore plus donné envie de le découvrir. Vu que ce roman est nominé pou le prix Julia Verlanger lors des prochaines Utopiales, j’ai donc décidé de me faire par la même occasion mon propre avis. À noter la couverture, illustrée par Diego Tripodi, que je trouve réussi, reprenant bien les codes du polar avec un vernis de fantasy.

L’histoire nous propose ici de découvrir Jaspucine, Fée de son état, qui est renvoyée pour la première fois sur terre depuis son fiasco lors de la révolution française, pour y retrouver la traitresse Zhellébore. Pour cela elle va s’adjoindre l’aide d’un détective prive, mais par n’importe lequel : Marc-Aurèle Abdaloff. Très vite les choses vont se révéler beaucoup plus compliqués et rien ne va, bien entendu, se passer comme prévu. On plonge finalement assez rapidement et facilement dans ce récit qui démarre sur les chapeaux de roues, reprenant les codes classiques du polar noir, avec cette histoire de kidnapping de bébé, mais qui va aussi rapidement se révéler complètement barré. L’auteur maîtrise parfaitement bien le démarrage de son récit entre humour, cynisme, action et aventures et le lecteur se retrouve alors à tourner les pages avec plaisir et envie d’en apprendre plus. Surtout que l’auteur n’oublie pas pour autant son intrigue qui va se révéler beaucoup plus complexe qu’initialement prévue avec son lot de complots, de trahisons et de mensonges. Entre roman d’aventure, roman policier, fantasy urbaine et aspect humoristique c’est un début réussi, entrainant et assez fascinant que nous propose l’auteur.

Le problème avec ce genre de récit, qui certes mélange les genre astucieusement, c’est de tenir sur la longueur et là je dois bien admettre que j’ai trouvé que l’auteur ne remplissait pas parfaitement le cahier des charges. Rien de bien méchant, ni de bloquant non plus, mais vers le milieu du livre j’ai commencé à ressentir un léger essoufflement, l’intrigue se retrouve alors en transition et redémarre avec quelques coups de pouces un peu trop faciles, partant d’ailleurs un peu dans tous les sens, et l’humour se révèle aussi alors moins mordant, moins percutant. Ça se lit quand même assez facilement et le rythme fait qu’on tourne toujours les pages avec un minimum de plaisir, mais voilà le lecteur se sent légèrement moins emporté par l’ensemble. Il faut ainsi attendre les 100 dernières pages pour de nouveau repartir tambour battant et à nouveau se retrouver happé avec entrain et envie d’en apprendre plus. D’ailleurs à noter que l’auteur nous offre une conclusion que j’ai trouvé réussie, énergique, tout en restant assez ouverte pour pouvoir offrir de possible suites.

L’univers de Fantasy Urbaine qui est construit au fil des pages se révèle solide, efficace et ne manque clairement pas de charme. On y retrouve la classique différenciation entre l’univers des fées et celui des humains, mais l’auteur joue astucieusement là-dessus pour nous offrir des aspects intrigants et fantaisistes qui se révèlent efficaces, offrant aussi de nombreuses anicroches entre les deux peuples qui sont des plus savoureuses. D’ailleurs c’est justement sur cette différence que l’auteur s’amuse pour nous offrir quelques piques sur notre société et notre façon de vivre toujours trop vite, sans prendre le temps, sans parfois réfléchir à ce qui est bon pour nous. Le tout possède aussi un vernis historique original, en effet le récit décide de revisiter l’histoire à sa façon, principalement concernant la révolution française, tout en restant cohérent et sans jamais alourdir ni la narration, ni le récit. L’aspect féérique et mystique ne manque pas d’intérêt, avec son lot de magie et de mystères qui se développe au fil des pages et se révèle prenant. L’aspect politique chez les fées ne manque pas non plus, lui aussi, d’ironie et de surprises, ressemblant au final assez fortement à celui des Hommes, avec sa reine, son conseil et ses nombreux complots pour obtenir le pouvoir.

La grande force du récit vient pour moi des personnages, principalement de leurs interactions, qui se révèlent fascinantes et ne manquent pas de faire sourire. Comment ne pas réagir devant Jaspucine qui redécouvre un monde qui a profondément changé et dont elle est loin d’en comprendre toutes les règles, ce qui amène de sacrées occasions surprenantes et cocasses. Comment ne pas rire non plus devant l’association de Jaspucine avec Marc-Aurèle, qui rêvait justement d’une vie plus mouvementée, dont l’alchimie marche à la perfection ; tous les deux si différents et pourtant complémentaires qui nous offrent des dialogues des plus savoureux et percutants. À ces héros viennent s’ajouter Etienne Petiot inspecteur complètement dépassé par les évènements et qui au fond de lui ne cherche qu’une vie normale, ou bien encore Bugnard personnage tout en muscle qui ne manque pas surprendre, mais aussi et surtout Premier de la Classe qui à lui seul vaut le déplacement par sa grande intelligence, sa façon de voir la vie, mais aussi les nombreux mystères qui planent sur lui. Des héros qui se révèlent donc efficaces, truculents, loufoques et pourtant humains, on s’accroche facilement à eux et j’aurai plaisir à les retrouver dans d’autres aventures, surtout s’ils continuent autant à me faire rigoler.

La plume de l’auteur se révèle assez soignée, jouant sur les mots et les phrases pour mieux surprendre le lecteur, même si elle tombe parfois un peu trop facilement dans le familier ce qui peut être lassant. Rien de bien gênant non plus. J’avoue qu’au moment où j’ai entamé ce livre j’avais Les Petites Fées de New-York en tête, mais l’auteur a réussi à finalement offrir quelque chose de vraiment différent dans le ton et la présentation, même si c’est vrai un tout petit peu moins drôle que ce que j’espérais. Dans tous les cas j’ai passé un bon moment de lecture avec ce roman et si l’auteur se propose d’écrire des suites je les lirai avec grand plaisir.

En Résumé : J’ai passé un bon moment de lecture avec ce roman qui nous propose une intrigue très polar noir mélangé à de la Fantasy et le tout complètement barré. Le démarrage nous happe dès les premières pages et on se retrouve entrainer avec plaisir dans les aventures de ces héros complètement truculents et aux dialogues percutants. Alors c’est vrai, j’ai ressenti un léger essoufflement vers le milieu du récit, l’enquête devenant calme s’offrant aussi quelques facilités et l’humour se révèle moins mordant. Mais une fois dans les 100 dernières pages on se retrouve de nouveau emporté pour aboutir à une conclusion efficace et réussie qui laisse la porte ouverte à des suites. L’univers de Fantasy Urbaine qui est développé au fil des pages est solide et offres des aspects originaux. La plume de l’auteur s’avère soignée jouant sur les mots et les expressions, même si parfois un peu trop familier. Au final un roman qui se lit facilement, qui m’a fait sourire et qui m’a envie de lire les suites si jamais l’auteur y revient un jour.

 

Ma Note : 7,5/10

La Voie des Oracles Tome 1, Thya – Estelle Faye

la voie des oraclesRésumé : La Gaule, Ve siècle après Jésus-Christ.
Cerné par les barbares, miné par les intrigues internes et les jeux du pouvoir, l’Empire romain, devenu chrétien depuis peu, décline lentement. Les vieilles croyances sont mises au rebut, les anciens dieux se terrent au fond des bois, des montagnes et des grottes, les devins sont pourchassés par la nouvelle Église.
Thya, fille de l’illustre général romain Gnaeus Sertor, a toujours su qu’elle était une Oracle. Il lui faut vivre loin de Rome, presque cachée, en Aquitania, perdue au milieu des forêts.
Que faire alors, quand son père, son protecteur, tombe sous les coups d’assassins à la solde de son propre fils ? Il faut fuir, courir derrière la seule chance qu’elle a de le sauver… Se fier à ses visions et aller vers Brog, dans les montagnes du nord, là où, autrefois, Gnaeus a vaincu les Vandales. Et peut-être, le long de ce chemin pavé d’embûches et d’incroyables rencontres, voir le passé refaire surface, et réécrire l’Histoire…

Edition : Scrinéo

 

Mon Avis : Il a fallu à peine deux romans pour me convaincre d’entrer Estelle Faye dans mon cercle des auteurs de l’Imaginaire à suivre. Que ce soit avec Porcelaine, qui revisitait avec brio les contes chinois (chronique ici), ou bien Éclat de Givre qui nous offrait une histoire post-apocalyptique fascinante et empreinte de poésie (ma chronique ), j’ai toujours passé un excellent moment de lecture avec ses livres. Par conséquent quand j’ai vu que le nouveau roman de l’auteur était proposé en partenariat sur Livraddict, j’ai décidé de tenter ma chance. Je remercie donc les éditions Scrinéo et Livraddict de m’avoir permis de découvrir ce livre. Concernant la couverture, illustrée par Aurélien Police, je la trouve magnifique.

Ce récit nous plonge dans l’empire Romain qui est en fin de vie, dans une époque où la religion chrétienne impose de plus en plus sa domination en faisant reculer et disparaitre les anciennes croyances. On y découvre Thya, fille du général Sertor, une oracle, obligée de se cacher, aidée par son père, en Aquitaine. Quand son père manque de se faire assassiner et se retrouve entre la vie et la mort, elle décide de fuir, poussée par le destin, vers Brog, forteresse qui a forgé la gloire du général. Elle va alors faire des rencontres qui vont la changer. Sur le fond l’auteur ne cherche pas à révolutionner la littérature Young Adult, nous proposant ici une héroïne qui se retrouve à devoir effectuer un voyage initiatique qui va l’amener à grandir et à évoluer. Pourtant l’auteur s’en sort très bien, nous offrant une histoire plus que solide, captivante qui se révèle fluide et efficace. Alors, j’ai trouvé le démarrage légèrement haché sur les deux, trois premiers chapitres, mais très vite cette sensation disparait au profit d’un récit qui se révèle maîtrisé et prenant que l’auteur parsème de révélations, de rebondissements et de surprises qui ont fait que je me suis retrouvé à tourner les pages avec l’envie grandissante d’en apprendre plus sur les nombreux secrets qui s’y cachent.

La grande force de l’histoire vient aussi de l’univers qui est construit autour de l’intrigue. En effet, il est clairement intéressant et fascinant à découvrir. L’idée de situer le tout au 5ème siècle, en plein empire romain n’est pas anodin et se révèle, je trouve, originale. Elle permet ainsi de développer d’un côté une Rome en pleine décadence qui touche à sa fin sous les complots et les envies de pouvoir, d’y découvrir aussi la grandeur et la richesse de l’époque ; tout en offrant de l’autre côté un aspect plus sombre, qui apparait avec l’influence grandissante de l’église et du christianisme qui apporte avec lui la fin d’une liberté de culte et qui attise aussi une certaine haine, menant les gens à dénoncer sorciers et sorcières. C’est ce monde à la fois troublant, beau et pourtant loin d’être idyllique avec ses zones d’ombres qui va amener l’héroïne à se découvrir, à découvrir qui elle est vraiment et quelle est son rôle. Qui dit oracle, dit magie et mystères et on retrouve ici un aspect mythologique que j’ai trouvé solide et intéressant, nous offrant un panel d’êtres mystiques tels que les Faunes, les Ondines ou les anciens dieux, qui pour le moment restent légèrement en retrait, mais soulève de nombreuses questions intrigantes sur la suite des aventures de l’héroïne et de son rôle à jouer. Une époque qui donne vraiment envie d’être découverte. L’auteur continue aussi dans ses écrits à nous faire découvrir le monde de l’art, avec ici Enoch le maquilleur, ce qui, selon moi, apporte un plus, tout en restant cohérent avec l’ensemble du récit.

Concernant les personnages ils sont finalement plus complexes qu’on peut le croire au départ et se révèlent rapidement assez attachants. Alors certes, on y retrouve l’aspect classique dans ce genre de récit, qui va amener l’héroïne à devoir évoluer devant les évènements, à devoir quitter le monde de « l’enfance » protégé pour affronter le monde adulte qui n’est pas toujours très joyeux et glorieux, mais l’ensemble est très bien construit, amené et captivant. Ils sont au final surtout humains avec leurs besoins, leurs envies, mais aussi leurs zones d’ombres, leurs mensonges que ce soit aussi bien envers les autres que vers eux-mêmes. Entre Thya, adolescente sauvage et fière qui n’a jamais vraiment connu autre chose qu’une vie recluse dans une villa, qui va devoir traverser le pays et aussi découvrir qu’être Oracle est plus un fardeau qu’un avantage, mais aussi Enoch personnage ambigu qui derrière son masque de dragueur insouciant cache une réalité bien plus sombre, ou bien encore Mettius l’ancien soldat qui se révèle complexe et secret, chacun s’avère travaillé, soigné et l’évolution de leurs relations apparait cohérente et accrocheuse. Concernant les personnages secondaires ils ne manquent pas non plus d’attraits, loin de tout manichéisme et certains devraient sûrement être plus développés dans les prochains tomes.

Alors après cela reste un roman Young Adult avec parfois ses passages un peu simple ou traités de façon une peu trop rapide, où ses révélations amenés un peu trop facilement à mon goût, mais l.’ensemble se révèle assez plaisant et prenant pour que cela ne se ressente jamais vraiment. On se retrouve ainsi entrainé à travers les différentes régions et les différentes aventures que vont rencontrer nos héros. Le tout est aussi porté par une plume que j’ai trouvé poétique, riche et entrainante, happant assez facilement et rapidement le lecteur pour ne jamais le lâcher au travers d’un récit maîtrisé. J’attends maintenant la suite du cycle avec impatience tant la conclusion laisse de nombreux points en attente de réponses. Au final un premier tome plus qu’efficace qui m’a offert un bon moment de lecture.

En Résumé : J’ai passé un bon moment de lecture avec ce roman qui nous offre une histoire, certes classique dans les grandes lignes, mais qui se révèle maîtrisé, entrainante, solide et efficace. On est vraiment emporté par les aventures des héros, le tout dans un univers d’Empire Romain en pleine décadence qui se révèle vraiment intéressant et original avec aussi un vernis réussi de magie et de mystère. Les personnages se révèlent véritablement denses, complexes et attachants avec leurs qualités et leurs défauts, ce qui les rend vraiment humains. Alors après, comme souvent dans le Young Adult, on y retrouve certaines transitions parfois un peu rapide et certaines révélations obtenues un peu trop facilement, mais rien de non plus très dérangeant tant je me suis retrouvé emporter par ce récit. La plume de l’auteur se révèle poétique, fluide et entrainante. La conclusion laisse de nombreuses questions en attente et j’ai maintenant hâte de découvrir la suite.

 

Ma Note : 7,5/10

 

Autres avis : Lelf, Dup, Livresse des Mots, Althea54, Emyline, …

Le Goût des Cendres – Maëlig Duval

le gout des cendresRésumé : Une jeune fille de province ambitieuse traverse guerre, révolution et épidémie avec toujours le même but : revenir vers sa famille auréolée de gloire.
Alors que les combats font rage aux frontières du royaume, elle s’introduit auprès des puissants d’une grande ville concurrente de la capitale et participe à un complot contre le roi.
D’amis en ennemis, d’espoirs en désillusions, elle se lancera par amour au cœur d’une insurrection, affrontera les préjugés pour sauver sa vie, connaîtra la traîtrise et l’amitié, sans jamais oublier son objectif : rentrer au pays et y être adulée.
Un royaume désenchanté qui n’est pas sans rappeler la Renaissance italienne et la Révolution française.
Une ville qui tente de sauvegarder sa grandeur en s’enivrant de théâtre et d’opéra.

Edition : Éditions du Riez

 

Mon Avis : La première chose qui m’a attiré vers ce livre, je dois bien l’avouer, c’est sa couverture que je trouve vraiment magnifique, malgré un aspect c’est vrai un peu chargé au premier plan. C’est bien simple, j’ai aperçu ce roman lors de mes nombreux détours aux dernières Imaginales et l’illustration de Vincent Devault n’arrêtait pas de m’attirer vers lui. J’ai donc décidé de me pencher dessus et, après la lecture de la quatrième de couverture ainsi qu’une discussion avec l’auteur pour en apprendre plus, j’ai décidé de me laisser tenter et le faire rentrer dans ma bibliothèque.

Ce roman nous propose donc de découvrir la fresque historique de la ville de Chaconne, ville de culture, d’art et de musique qui est dirigée une intendante avide de pouvoir et qui va passer du joug de la royauté et de la guerre à la révolution, le sang et la souffrance, le tout à travers les yeux de l’héroïne, Aldire, qui se retrouve emportée en plein milieu de toutes ces changements et qui va même y jouer un rôle important. L’idée de départ se révèle intrigante, décider de reprendre la révolution française et y ajouter le charme et l’insouciance des villes érudites italiennes se révélait très tentant. L’auteur développe aussi pas mal de bonnes idées qui changent profondément de la Fantasy classique, il y avait donc potentiellement de quoi me captiver et me passionner. Pourtant je dois bien avouer qu’une fois la dernière page tournée, je ressors de ma lecture avec un sentiment mitigé, l’impression d’avoir une histoire à fort potentiel, mais pas totalement maîtrisée.

Première chose qui peut surprendre dans le récit, mais que j’ai trouvé pourtant attrayant et original, c’est que l’auteur n’offre pas vraiment d’intrigue globale à son histoire. L’héroïne vient initialement à Chaconne pour essayer d’y retrouver son fiancé, mais son ambition va alors la faire rester menant différentes petites missions pour le compte de l’intendante. L’auteur évite ainsi de baliser une histoire avec une introduction, un objectif et une conclusion, offrant  une tranche de vie de l’héroïne, de la ville et du pays. Un véritable voyage initiatique d’une jeune fille déracinée qui découvre une façon de vivre complètement différente. Cela permet aussi à l’auteur de développer de façon plus dense sa toile de fond qui est finalement le point important du récit.

Car oui le véritable point fort et ce qui m’a le plus attiré dans ce livre c’est tout le background qui est présenté et travaillé au fil des pages. La quatrième de couverture parle d’influence de la révolution française et la renaissance italienne et elle n’a pas vraiment tort, tant l’ensemble sent la poudre et la subversion, avec une aristocratie décadente et futile qui préfère se lancer à corps perdu dans l’art et la culture que de se pencher sur les problèmes qui délitent la société. Entre manipulation, intrigue, conquête, jeux de pouvoir et bouleversement politique, le monde qui se dévoile se révèle vraiment, dense, complexe et ne demande qu’à être découvert en profondeur s’offrant aussi quelques réflexions intéressantes et toujours d’actualité. L’ensemble est aussi mâtiné d’un léger vernis de magie et de mystère qui apporte un plus, je trouve, et permet de développer d’autres sous-intrigues. Mais voilà c’est un peu là le problème, l’histoire se développe dans beaucoup de directions et, ce qui au début offrait un agréable sentiment d’épaisseur et de foisonnement, offre peu à peu une légère impression de cafouillis et de frustration. Cela donne un peu l’impression que l’auteur a trop voulu en faire, apportant trop d’idées et de développements, se sentant obligée de tous les développer et par conséquent délaissant des passages importants qui auraient mérité plus de travail. Par exemple la révolution tient sur à peine un chapitre et le lendemain tout parait presque rentré dans l’ordre. C’est dommage car ça gâche un peu le rythme tant à certains moments on a l’impression d’aller trop vite et à d’autres de trop prendre son temps. Peut-être que Maelig Duval aurait du développer son univers sur plusieurs tomes.

Il faut aussi bien avouer qu’on n’est pas toujours aidé par l’héroïne Aldire. C’est bien simple je n’ai jamais vraiment pu m’accrocher, ni m’attacher à elle. Pourquoi ? Car je n’ai jamais réussi à comprendre sa logique, sa façon de réagir. À chaque fois qu’elle devait prendre une décision elle arrivait à faire le choix le plus improbable qui soit. Un exemple, notre héroïne, qui a 16 ans doit, au début du récit, libérer son fiancé qui est en prison. Pour cela il lui faut de l’argent ; elle se retrouve donc à faire la manche. Un inconnu va lui proposer de la payer en échange d’une mission secrète. Il l’emmène donc en discuter dans un lieu discret qui se révèle être une maison close. Il a besoin d’elle pour voler un personnage important, mais vu qu’il n’a encore rien dit à ce moment-là, la confusion est de mise avec ce qui pourrait passer être un intérêt pour son corps. Et là, tout de go, elle annonce qu’elle accepte de coucher avec lui, le tout pour sauver un fiancé qu’elle avoue ne pas aimer deux pages plus loin. Car oui, elle ne cherche pas vraiment a le libérer par amour, elle espère juste ressortir auréolée de gloire d’avoir ramené son compagnon qui est ici, aussi, pour sauver leur région d’un complot. Quelle gloire elle pourrait en tirer? Si elle était désespérée encore, je pourrai le comprendre, mais plus tard on apprend qu’elle pouvait demander l’argent chez elle et se le faire rapporter, mais elle trouvait ça trop long ; il aurait pu être racheté par quelqu’un d’autre. Puis ça dénote complètement avec la présentation de l’héroïne dans une grande partie du roman qui est montrée comme assez prude et réservée.

Et franchement là, je ne montre qu’un exemple, cela va se reproduire deux ou trois fois dans le récit où elle va réussir à faire quelque chose qui va complètement me sortir de mon immersion dans le livre. Même la conclusion, qui est pourtant intéressante avec cette plongée dans la folie et la fin d’une époque, repose sur des actions de l’héroïne et de son amant que j’ai du mal à vraiment comprendre tant elles paraissent mal amenées, comme s’il manquait des passages et des réflexions pour vraiment bien les appréhender. Ensuite, niveau attachement, elle est très égocentrique, espérant que tout le monde tombe à ses pieds et quand ce n’est pas le cas se réjouissant intérieurement de leur malheur, ce qui fait que j’ai eu du mal à l’apprécier complètement. Dommage, car elle possédait un vrai potentiel, l’auteur nous offrant une sorte de mélange entre Milady de Winter et de symbole féminin de la révolution, elle aurait mérité un développement peut-être différent, voir même d’être plus impliquée dans les différents mouvements de révolutions et de manipulations, car parfois elle reste franchement trop en retrait des évènements à mon goût. Les personnages secondaires qui gravitent autour d’elle ne sont pas mauvais, loin de là, entre romantiques, artistes, hommes de l’ombre et hommes du peuple ils représentent panorama assez vaste de cette ville.

Le style de l’auteur se révèle en tout cas agréable, efficace et soigné, mais elle se perd parfois un peu trop dans de longues descriptions, qui par moment, alourdissent un peu la lecture. C’est assez regrettable car elle arrive clairement à rendre vivant son monde, à rendre saisissantes certaines scènes que ce soit dans l’aspect violent, comme dans la beauté. Au final je ressors donc de ma lecture avec une impression de n’être que moyennement convaincu, il y a énormément de potentiel, pas mal de bonnes réflexions, de très bons passages, mais voilà l’ensemble perd de sa saveur devant un trop grand foisonnement d’idées qui les empêchent de bien se développer et devant une héroïne qui ne m’a jamais convaincu ni attaché. Le Goût des Cendre se révèle indépendant, mais la conclusion laisse énormément de questions en suspens, de quoi sûrement écrire un autre roman dans le même univers. Je ne sais pas si je le lirai, à voir si l’auteur change son héroïne, mais en tout cas je serai bien tenté de découvrir sa plume dans une histoire différente.

En Résumé : Je ressors donc de ma lecture avec un sentiment assez mitigé, l’impression d’avoir un roman entre les mains avec beaucoup de potentiel mais parfois mal maîtrisé. L’histoire pourtant se révélait originale, ne possédant pas vraiment de trame globale, mais mettant plus en avant l’évolution d’une ville et d’un pays face aux changements politiques qui apparaissent. Une intrigue pleine de trahisons et de manipulations. Mais voilà l’auteur cherche parfois à trop en faire, ce qui fait que certains lignes d’intrigue paraissent à peine esquissées là ou certaines traînent en longueur. De plus je n’ai jamais complètement réussi à m’attacher ni à comprendre l’héroïne principale qui arrive toujours à faire le choix le plus improbable et illogique selon moi. Dommage, car elle possédait du potentiel et se révélait bien entourée par des personnages secondaires hétéroclites et efficaces. Le style de l’auteur se révèle agréable, efficace et plutôt entrainant malgré parfois quelques longueurs au niveau des descriptions. La conclusion reste assez ouverte pour permettre de revenir dans cet univers, mais pas sûr que je me laisse tenter sauf si changement d’héroïne peut-être. Par contre je ne suis pas contre découvrir la plume de l’auteur dans d’autres écrits.

 

Ma Note : 5,5/10

 

Autres avis : Lire-une-passion, Louve, …

Shattered Sea Book 1, Half a King – Joe Abercrombie

half a kingRésumé : Prince Yarvi has vowed to regain a throne he never wanted. But first he must survive cruelty, chains and the bitter waters of the Shattered Sea itself. And he must do it all with only one good hand.
Born a weakling in the eyes of his father, Yarvi is alone in a world where a strong arm and a cold heart rule. He cannot grip a shield or swing an axe, so he must sharpen his mind to a deadly edge.
Gathering a strange fellowship of the outcast and the lost, he finds they can do more to help him become the man he needs to be than any court of nobles could.
But even with loyal friends at his side, Yarvi’s path may end as it began – in twists, and traps and tragedy…

Edition : Harper Voyager

 

Mon Avis : C’est bien simple, de Joe Abercrombie j’ai lu tous ses romans et je dois bien avouer que je n’ai jamais été déçu. Ils m’ont toujours offert des histoires terriblement efficaces, pleine de cynisme et de surprises qui ont toujours su m’entraîner tout en revisitant les codes de la Fantasy. Cette fois l’auteur a décidé de se lancer dans une nouvelle trilogie, mais un peu plus jeunesse ou, pour être un peu plus précis, Young Adult. J’ai longtemps hésité à commencer ce cycle en VO, la sortie VF étant annoncé en octobre chez Bragelonne je pensais pouvoir attendre jusque là, mais j’avoue, j’ai été convaincu de le lire en anglais après avoir découvert l’illustration de couverture que je trouve vraiment réussie.

Ce roman nous propose donc de découvrir et de suivre le Prince Yarvi, second fils du roi de Gettland, rejeté par son père face au handicap d’une de ses mains qui le rend infirme et par conséquent considéré comme faible, qui va voir sa vie bouleversée lorsque son père et son frère se font assassiner par un roi voisin. Il n’a d’autre choix alors, poussé par sa mère, que de porter la couronne. Mais cette idée ne plait pas à tout le monde et il va se retrouver rapidement trahi et abandonné. Ce qui est vraiment intéressant avec l’auteur c’est qu’il nous plonge directement dans l’intrigue, le lecteur se retrouve donc happer par le nouveau destin qui s’ouvre devant ce prince, devenu roi dès les premières pages, et se retrouve à tourner les pages avec envie pour en apprendre plus. On sent d’ailleurs bien tout son talent de conteur avec un début un peu lent, qui sert de présentation, court et entrainant et qui se révèle alors par la suite au fil des pages de plus en plus haletant, prenant et sans temps morts offrant ainsi son lot de surprises, de révélations et de rebondissements. Le héros, lui qui n’a connu que la vie de château et les études qui ont développé son esprit mais pas vraiment son corps, va se retrouver plonger dans un monde dur, violent, sauvage et il va devoir faire face à des péripéties qui vont le changer complètement, mais aussi se faire des alliés à sa cause.

Alors, Je ne vais pas le cacher, globalement l’histoire n’a rien de révolutionnaire. Une histoire de vengeance, d’envie et de jeux de pouvoirs qui vont amener leurs lots de trahisons, en Fantasy cela reste assez classique. D’ailleurs dans les grandes lignes on voit quand même quelques passages arriver à l’avance, avec ce voyage initiatique de Yarvi qui va de la trahison, à la découverte d’amis improbables qui vont l’aider à tenter de reconquérir son trône. Mais voilà l’ensemble est porté par ce qui fait la force de l’auteur : son côté sombre, cynique où rien n’est rose, rien n’est acquis, où tout le monde peut souffrir. L’auteur a toujours poussé ses héros au maximum, devant se battre à chaque instant et côtoyer la mort régulièrement pour obtenir ce qu’ils veulent ; et personne n’en sortira intact. C’est justement ce dont j’avais un peu peur, que l’auteur, devant son envie d’écrire un récit un peu plus jeunesse, s’assagisse de trop et perd un peu de son côté noir et violent qu’on retrouve dans ses romans adultes, mais il prouve que non. Attention ne me faites pas dire non plus ce que je n’ai pas dit, c’est loin d’être aussi sauvage, sanglant et de prendre autant aux tripes que ces livres plus matures. Obligatoirement ce Half a King est un peu plus « sobre », mais il évite clairement le côté gentillet qui m’aurait dérangé. Ce qui est une très bonne chose.

Concernant l’univers construit tout au long du roman il se révèle solide, efficace et surtout appelle clairement à en apprendre plus, même s’il reste pour le moment assez classique pour un lecteur de Fantasy. L’auteur nous offre ainsi un monde typé moyenâgeux avec une couche viking, constitué de plusieurs pays avec leurs us et coutumes, chacun possédant leur Roi et le tout sous la gouvernance du Haut-Roi. L’aspect du pouvoir est intéressant avec donc le souverain guidé par son ministre, formé pour être toujours à ses côtés, qui possède les connaissances. Concernant tout le côté mythologique, on retrouve ici quelque-chose qui se révèle simple, assez vaste et qui, j’espère, sera plus développé dans les prochains tomes, comme par exemple devant tous les dieux qui nous sont esquissés. Il s’offre aussi un peu de mystère avec ce peuple elfique disparu qui a laissé des constructions indestructibles, ce qui fait légèrement penser à Locke Lamora et son Verre d’Antan, et qui donne envie d’en apprendre plus. Au final un univers efficace qui garde encore son lot de mystères de par devers lui, qui j’espère seront étoffés par la suite.

Concernant les personnages ils ne manquent pas d’attraits. On s’attache finalement assez facilement à Yarvi, rejeté pour sa différence, impossible de vraiment s’imposer dans son monde, et qui va au fil des épreuves se fortifier et devenir un véritable leader. C’est cette transformation qui d’ailleurs joue beaucoup sur le fait qu’on continue à suivre avec envie ses aventures, le fait que le héros ne reste pas figé, obligé d’apprendre la vie et d’évoluer à travers les coups qu’il reçoit. Les personnages secondaires qui entourent notre héros sont nombreux, soignés, ayant leurs propres convictions et leurs propres envies que ce soit à travers les compagnons du héros, comme ses ennemis, chacun s’avère humain. Je regrette peut-être juste qu’un ou deux des protagonistes possèdent certains traits de caractère parfois un peu trop proche de certains héros qui apparaissent dans ses autres séries, mais franchement rien de bien bloquant non plus.

La plume de l’auteur se révèle incisive, efficace et percutante, nous entrainant dans son récit avec facilité pour faire découvrir les nombreuses péripéties que va rencontrer le héros. Au final on obtient un roman, visant un public assez large, qui se révèle solide, certes avec certains aspects classiques, mais dont l’auteur apporte sa touche personnelle pour offrir un ensemble qui ne manque pas d’intérêt et dont on tourne facilement les pages. La conclusion de ce premier tome apporte d’ailleurs sont lot de révélations et de surprises tout en donnant envie d’en apprendre plus. Je lirai la suite sans soucis qui devrait normalement sortir en Anglais début 2015.

À noter que ce livre sera publié en France par Bragelonne, le 22 octobre 2014, sous le titre La Mer Éclatée Tome 1, La Moitié d’un Roi.

En Résumé : J’ai passé un bon moment de lecture avec ce premier tome de la nouvelle trilogie de l’auteur. Il nous offre une histoire solide, entrainante et captivante qui nous happe dès les premières pages. J’avais un peu peur que Joe Abercrombie, devant son envie d’écrire aussi pour un public plus jeune, perde de son côté sombre et violent, mais il n’en est rien. Alors certes ça reste plus « sage » que ce qu’il propose en adulte, mais il sait toujours aussi bien rendre la vie compliquée à tous ses héros. L’univers développé se révèle intéressant et possède encore son lot de mystères que j’espère voir développer par la suite. Concernant les personnages on s’attache assez facilement à Yarvi rejeté la faut à son handicap et qui va devoir évoluer dans la douleur et la souffrance. Les personnages secondaires sont aussi intéressants à découvrir, même si une ou deux fois certains traits de caractère nous rappellent des héros d’autres séries de l’auteur. La plume est toujours aussi incisive et percutante, nous entrainant avec facilité dans son histoire pour aboutir à une conclusion réussie, pleine de révélations et de surprises. Au final un premier tome plus que solide qui vient poser l’univers et les personnages et qui me donne envie de lire la suite.

 

Ma Note : 7,5/10

Immortel – Catherynne M. Valente

immortelRésumé : Kochtcheï l’Immortel est au folklore russe ce que les démons et les sorcières sont à la culture occidentale : un personnage menaçant et maléfique ; mais nul n’a jamais dépeint Kochtcheï comme Catherynne Valente, qui modernise le conte, le bouleverse et resitue l’action à l’époque moderne et couvre ainsi nombre des grands bouleversements de la Russie du XXe siècle. La jeune Maria Morevna, une brillante enfant de la révolution, devient la belle épouse de Kochtcheï avant de causer sa perte. En chemin, elle croisera des lutins stalinistes, accomplira des quêtes magiques, apprendra des secrets, se heurtera à la bureaucratie, à des jeux de désir et de domination. Immortel est un choc entre l’histoire magique et l’histoire réelle, la révolution et la mythologie, l’amour et la mort ; il ressuscite la légende russe sous une forme étonnante.

Edition : Eclipse

 

Mon Avis : Ce roman a terminé dans ma PAL pour deux raisons, la première vient tout simplement de sa couverture, illustrée par Beth White, que je trouve magnifique avec son mélange de noir, de blanc, de rouge et ses jeux d’ombres, ensuite la seconde vient de son résumé qui a eu le don de m’attirer par son côté différent et intriguant. Il faut dire que c’est un peu une des forces de la maison d’édition Eclipse, d’essayer de chercher à proposer des textes à l’opposé de ce qui se fait actuellement, même s’il m’arrive parfois de râler sur leur capacité à ne pas sortir les suites de séries qui m’intéressent et à offrir peut-être un peu trop de zombies. En tout cas ce livre annoncé comme un one-shot a rapidement terminé entre mes mains avec l’envie de le découvrir et me faire mon avis.

Alors, autant être clair d’entrée de jeu d’un point de vue des légendes Russe, mis à part Baba Yaga dont j’ai lu une ou deux histoires, je ne connais pas grand-chose de leurs contes. C’est donc une lecture et une chronique sans a priori de ce point de vu que je vous propose. Car oui, l’auteur a décidé de construire son histoire en nous offrant un mélange que j’ai trouvé réussi de mythologie et de réalité, avec une découverte de la Russie partant de la révolution jusqu’à la seconde guerre mondiale. Je dois bien avouer que ce livre au final se révèle clairement dense, complexe, travaillé et qu’il a réussi à me captiver, à me happer, quasiment du début à la fin.

C’est bien simple l’auteur est parti d’une réécriture de la légende de Maria Morevna et de Kochteï et a décidé de la modifier, de l’adapter à son récit tout en y ajouter une couche historique. On se retrouve alors avec une intrigue qui mélange magie et imaginaire avec des aspects plus réalistes, plus vivants, humains. On est alors emporté par le monde fertile, poétique et dense qui nous est présenté au fil des pages. Entre un monde parallèle au notre qui se révèle plein d’envoûtements, de mystères avec un bestiaire qui se dévoile passionnant avec ses monstres flamboyants, surprenants comme Baba Yaga, les domovoïs, les oiseaux de feu, etc…, et un monde réel plus banal avec ses souffrances, ses violences, sa noirceur et ses contraintes. Mais voilà l’auteur n’oublie pas pour autant qu’un conte peut aussi se révéler cruel, que ce soit dans la réalité comme dans l’imaginaire, la guerre gronde à toutes les portes et risque de tout emporter, que ce soit celle entre la vie et la mort ou celle face aux allemands. Un récit dont je trouve que finalement la beauté vient de son étrangeté : c’est difficile à expliquer,  il faut oublier son esprit cartésien à vouloir cherche une logique à tout, mais plutôt se laisser emporter par les mystère et l’inconnu, se laisser entrainer devant ses nombreuses rencontres improbables et ses nombreux traits magiques qui ne sont pas toujours expliqués, mais qui pourtant fascinent.

L’histoire qui se construit est également une histoire humaine, qui traite de nombreux sujets que ce soit la différence vis-à-vis de l’héroïne qui voit des choses que les autres ne voit pas et se retrouve rejeter, l’Amour et le mariage avec ses règles, à la fois pleines de beauté mais aussi remplie de mensonges, de trahisons ou encore de douleurs, ou bien encore sur la Guerre. Les passages à Leningrad durant 1942, ville sous les bombardements et qui se meurt de faim, se révèlent franchement poignants, tristes et troublants. L’auteur n’oublie pas aussi de traiter la Russie, plus précisément de son histoire offrant ainsi bon nombre de réflexions que ce soit sur la révolution qui a soi-disant rendu le pouvoir au peuple ou bien encore sur le communisme, qui a suivi dans la foulée, avec ses nombreux rêves de partage qui n’ont jamais abouti. Autre aspect qu’on retrouve, qui est certes plus classique, mais amené de façon solide et efficace, c’est la disparition de la magie et du folklore au profit de la modernité, de la guerre, de l’oubli et de la mort qui gagne de plus en plus de partisans. On découvre aussi un peuple, Russe, de résistant, que ce soit face aux différentes autorités ou bien encore face aux hivers glacés ; des populations qui ne cherchent qu’à avancer et qui ont la survie ancrée en eux. Immortel s’avère donc être un récit complexe, sombre, qui peut se lire sur différents niveaux et qui ne doit pas se savourer trop vite sous peine, peut-être, de passer à côtés de certains passages riches, denses et magnifiques.

Il faut aussi bien admettre que l’ensemble est porté par des personnages troublants et surprenants. On est véritablement happé par Maria Morevna, dont on découvre au départ l’innocence, qui va peu à peu se retrouver perverti par la découverte du monde, de ses lois et du mariage. Car c’est aussi ça ce récit, un voyage initiatique qui va amener notre héroïne à devenir plus dure, à s’adapter à son univers qui est loin de ses rêves de jeunes filles, où la magie ne la protège en rien de la mort qui attend toujours au tournant. Sa relation avec Kochtcheï, sur ton de soumission/domination, apporte aussi quelque-chose de troublant, de sensuel et d’entrainant. Ce mélange de passion et de cruauté, de fuite vers l’oubli ne manque pas d’attrait, mais ne dure jamais. Ivan, et son côté humain, vont lui rappeler qui elle est, que la vie n’est pas que folie et mystère, qu’elle possède aussi ses propres règles, ses propres tourments. Tous les autres personnages qu’on découvre au fil des aventures de l’héroïne paraissent envoutants par leurs étrangetés, mais aussi par ce qu’ils apportent au fil de la lecture. C’est justement leurs ambivalences qui arrivent à captiver le lecteur, ils font des choix en fonction de leurs envies, loin de tout manichéisme, les hommes trahissent, les femmes aussi, personne n’est parfait, chacun ne fait que finalement chercher son bonheur pour essayer de contrôler, d’oublier.

Et pourtant, certains points m’ont tout de même dérangés dans ce roman. Malgré toutes les qualités qu’on y retrouve, que ce soit aussi bien dans la construction du récit, les différentes histoires et légendes imbriquées ou encore dans la plume de l’auteur, ce roman possède quelques longueurs. Plus précisément j’ai en partie décroché vers la fin sur toute la partie qui vient après la guerre de Leningrad, je ne veux pas trop spoiler mais c’est le passage où Maria oublie. Je ne sais pas trop pourquoi ces 50 pages, environ, m’ont paru longues, possédant trop de petites histoires qui n’apportent rien au récit. Je pense qu’avec moins de pages, l’ensemble aurait gagné en intérêt. Certes rien de non plus bloquant ou dérangeant tant l’ensemble m’a marqué, mais voilà selon moi sans ces passages l’ensemble aurait pu être encore un cran au-dessus.

Concernant la plume de l’auteur elle s’avère clairement entrainante, poétique, magique et fluide, plongeant le lecteur avec facilité dans son monde captivant. On sent bien aussi qu’elle a effectuée de nombreuses recherche pour rendre son récit, patchwork de légendes et d’Histoire, cohérent et passionnant. Je suis d’ailleurs maintenant très tenté de découvrir le Folklore Russe dont, comme je l’ai dit, je n’ai finalement que peu de connaissance. En tout cas je dois bien avouer que je suis aussi très tenté de découvrir d’autres écrits de l’auteur.

En Résumé : J’ai passé un très bon moment de lecture avec ce livre qui nous propose une histoire, mélange de féérie et d’histoire de la Russie, de façon vraiment passionnante et entrainante. Entre folie et douleur on se laisse porter par ses passages poétiques et ses zones d’ombres que l’auteur arrive à rendre cohérents et captivants. Elle nous propose aussi à travers son récit de nous faire réfléchir sur la Russie, son Histoire, et son peuple, mais aussi su des sujets tels que l’amour et le mariage ou bien encore sur la fin de la magie au profit de la modernité et de la guerre. Le monde qui se développe au fil des pages se révèle troublant, mystérieux et terriblement efficace, donnant envie d’en apprendre plus. Concernant les personnages ils sont vraiment attachants et prenants, se montrant humains au fil des pages, loin de tout manichéisme, ne cherchant finalement qu’une parcelle de bonheur et d’oublie. Je regrette juste quelques longueurs, principalement vers la fin qui font que j’ai un peu décroché de l’histoire, mais rien de non plus bloquant. La plume de l’auteur est entrainante, pleine de poésie et de magie, donnant envie de découvrir d’autres de ses récits.

 

Ma Note : 8/10

 

Autres avis : nymeria, ferial, Le Bibliocosme, etc…

The Rain Wild Chronicles Book 4, Blood of Dragons – Robin Hobb

blood of dragonsRésumé : Dragon blood and scales, dragon liver and eyes and teeth. All required ingredients for medicines with near-miraculous healing powers. The legendary blue dragon Tintaglia is dying of wounds inflicted by hunters sent by the Duke of Chalced, who meanwhile preserves his dwindling life by consuming the blood of the dragon’s poet Selden Vestrit. If Tintaglia perishes, her ancestral memories will die with her. And the dragons in the ancient city of Kelsingra will lose the secret knowledge they need to survive. Their keepers immerse themselves in the dangerously addictive memory-stone records of the city in the hope of recovering the Elderling magic that once allowed humans and dragons to co-exist. In doing so they risk losing their own identities, even their lives. And danger threatens from beyond the city, too. For war is coming: war between dragonkind and those who would destroy them.

Edition : Harper Collins

 

Mon Avis : Encore une nouvelle lecture anglaise, je suis assez content de moi je trouve que j’arrive de mieux en mieux à lire en VO, limitant mes aller-retour avec le dictionnaire. Je me lançais dans le quatrième tome de cette série avec, j’avoue, un léger ressenti, le troisième tome trainant, pour moi, un peu trop en longueur (chronique du Tome 1, Tome 2, Tome 3). J’avais donc un peu peur que ce quatrième tome ne soit pas obligatoirement à la hauteur de mes espérances, surtout qu’il vient aussi clôturer le cycle. D’un autre côté j’avais pourtant hâte de voir comment allait s’en sortir certains personnages et les choix qu’ils allaient faire. En tout cas la couverture est clairement dans la lignée des précédents et je la trouve assez sympathique, annonçant même quelque-chose d’un peu plus guerrier. Attention par contre il y a de gros risques de spoiler, je m’en excuse d’avance.

Je dois bien avouer que, finalement, une fois la dernière page tournée, je ressors de ma lecture avec un léger sentiment de déception. Je ne vais pas dire que ce récit est complètement mauvais, il y a tout de même des aspects qui se révèlent intéressants, mais j’ai trouvé que l’auteur se base un peu trop sur ses acquis de conteuse et en oublie le reste. Déjà reprenons l’intrigue, pour rappel on suit des dragons qui sont nés difformes et décident, accompagnés de volontaires humains, de retrouver Kelsingara la ville disparue des Elderlings (les anciens en VF si je ne me trompe pas) le tout teinté d’un conflit avec Chalced qui cherche à tuer des dragons pour sauver le Duc. Déjà là, j’aurai dû me rendre compte qu’il y avait un soucis, tenir quatre tomes sur, je schématise, une bande de scouts qui traversent une rivière avec des monstres asociaux, c’est un véritable tour de force. Niveau épique, comme clairement annoncer sur la couverture, on repassera aussi, car finalement pendant quatre tomes on ne fait que tourner en rond sur les considérations sentimentales et émotionnelles des personnages. Sur un voir deux volumes je pense que l’ensemble aurait bien marché, sur quatre cela donne clairement l’impression de stagner et de ne pas avancer.

Pourtant l’auteur arrive toujours aussi facilement à nous offrir des personnages humains, complexes qui ne manquent pas d’intérêts et se révèlent un minimum attachants. J’ai apprécié voir Alise prendre enfin son destin en main, faire ses propres choix et affronter ses démons, tout comme j’ai bien aimé le personnage de Rapskal qui sombre lentement dans la folie. Concernant Thymara, je ne sais que dire, je trouve le personnage intéressant avec ses doutes et ses forces, mais voilà mettre tout un cycle, d’environ 2000 pages, pour se sortir laborieusement d’un triangle amoureux m’a vite ennuyé. Bon il faut aussi avouer que les triangles amoureux m’ont toujours laissé perplexe et même si ici Robin Hobb s’en est un peu mieux sorti que d’autres c’est quand même long, surtout que finalement son choix se fait plus par défaut. Concernant les personnages de Malta et de Reyn je reste perplexe, je me souvenais d’eux dans Les Aventuriers de la Mer comme des héros fougueux, luttant pour leurs choix, hors ici j’ai eu l’impression de les trouver fantomatiques, abattus, comme si les évènements glissaient sur eux et qu’ils restaient limite spectateurs, alors qu’il y avait mieux à faire. Pareil le troisième tome avait mis en avant Selden et Hest comme personnages principaux, j’avoue à l’époque j’étais resté perplexe, trouvant qu’ils servaient plus de remplissage et ce quatrième a confirmé ce que je pensais. Les passages concernant Selden sont vraiment répétitifs et Hest joue un peu le rôle du Bad Boy qu’on traine pour avoir un vilain et qu’on fait disparaitre sans véritable logique une fois qu’on a plus besoin de lui. Dommage.

Concernant l’univers il se révèle toujours aussi intéressant à suivre et à découvrir au fil des pages, même s’il perd un peu de son aspect nouveauté. On en apprend enfin plus sur Kelsingara qui se dévoile et ne manque pas de charme, que ce soit à travers les descriptions proposées comme les différents éléments et objets qu’elle offre. On en apprend plus aussi sur Chalced, et plus principalement sur son Duc et le pouvoir, offrant des passages plus sombres, plus violents ce qui ajoute une touche supplémentaire intéressante je trouve. Concernant les Dragons, ils sont enfin de retour et se révèlent toujours aussi arrogant, se sachant clairement plus forts et supérieurs que les humains et j’apprécie toujours autant cette vision des choses qui me parait tellement cohérente, même si par moment j’ai trouvé qu’elle les humanisait peut-être un peu trop. En tout cas un monde qui donne toujours envie d’en apprendre plus.

Surtout l’impression que me donne ce roman c’est de ne pas être abouti, pendant près de trois tomes trois-quart l’ensemble avant à un rythme assez lent puis j’ai eu l’impression que pour le dernier quart de ce Blood of Dragons l’auteur donne la sensation de trop accélérer et limite de bâcler cette partie. Pour dire la fameuse bataille entre les Dragons et Chalced on ne la verra jamais, une ellipse tellement frustrante fait qu’on passe d’une page où on a, je schématise encore, « on va tuer les méchant » à la page suivante « le méchant Duc étant mort la paix est donc revenue dans le royaume ». Je ne dis pas que cette guerre méritait des pages et des pages, mais ici c’était un peu le point d’orgue du cycle, venant le conclure et ne pas la traiter m’a frustré. De plus l’épilogue que propose l’auteur parait assez clair, elle n’a pas encore abandonné les dragons et risque d’y revenir à travers d’autres romans. Si elle écrit, j’y reviendrais sans soucis, c’est sûr, mais j’espère qu’elle arrivera à mieux gérer son récit sinon je risque de vite abandonner cette fois.

Pourtant ce qui est assez fascinant c’est que j’ai continué à tourner les pages de ce livre, j’arrive toujours à me laisser emporter par la plume de l’auteur qui se révèle toujours aussi efficace, soignée et fluide. Je trouve qu’elle possède un vrai talent de conteuse et, même si je n’accroche pas toujours à ses personnages, elle arrive à les rendre attachants et humains. D’où aussi sûrement une plus grande frustration car, finalement, ce que je reproche à ce livre c’est que l’auteur a voulu trop en faire, nous offrant une série en 4 tomes là où 2 auraient fortement suffit je trouve, ce qui donne l’impression que les derniers tomes sont mous. Au final cette série est loin d’être ma préférée de l’auteur, surtout comparer aux excellent moments qu’on pu me proposer L’assassin Royal ou encore Les Aventuriers de la Mer, et j’avoue ressortir de ma lecture légèrement frustré. Cela ne m’empêchera de lire d’autres écrits de l’auteur. D’ailleurs je devrais faire rentrer sous peu le premier tome de sa nouvelle série sur Fitz et le Fou toujours en VO.

À noter que ce 4ème tome en VO correspond aux tomes 7 et 8 de La Cité des Anciens paru en VF.

En Résumé : Je ressors de ma lecture de ce quatrième et dernier tome pas totalement convaincu, loin de là. Alors certes la plume de l’auteur est toujours aussi fluide et entrainante, sachant conter avec talent une histoire, de plus l’univers est toujours aussi solide et intéressant à découvrir avec Kelsingara qui se dévoile enfin, mais voilà le reste ne suit pas vraiment. L’histoire m’a paru prendre beaucoup trop son temps et ne s’intéresser finalement qu’à des considérations sentimentales, oubliant parfois un peu le reste. De plus la conclusion qui doit aboutir à une guerre, point d’orgue de ce cycle, m’a paru bâclé et se reposant sur des ellipses frustrantes. Concernant les personnages je suis plutôt mitigé, certains héros sortent vraiment du lot, mais d’autres paraissent trainer toujours les mêmes problèmes depuis le début ou bien donnent l’impression d’être inutiles. Pour moi ce cycle aurait dû tenir en deux tomes, quatre je trouve que ça fait beaucoup trop. Une série qui au final a du mal à se révéler marquante, mais cela ne m’empêchera pas de lire d’autres écrits de l’auteur, d’ailleurs je devrai bientôt faire entrer dans ma PAL le premier tome sur Fitz et le Fou en VO.

 

Ma Note : 5,5/10

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