Aucun Souvenir Assez Solide – Alain Damasio

aucun souvenir assez solide Résumé : Alain Damasio nous invite à la rencontre de grands « vivants », c’est-à-dire de grands claustrophobes, amoureux de l’air et de l’Ouvert. Champions de toutes les aérations, celles de l’espace, du son, des mots, du collectif, et de ce fait totalement libres, entrés en un jeu d’échos fou avec les mouvements du monde, ils tracent et suivent leurs lignes de fuite, tel le surfeur qui n’existe et ne consiste que dans la furtivité.

Edition : La Volte

 

Mon Avis : Pour tous les amoureux de l’Imaginaire je pense qu’il n’est plus besoin d’expliquer qui est Alain Damasio, l’auteur de l’excellent roman La Horde du Contrevent (chronique ici) mais aussi de La Zone du Dehors (qui est dans ma PAL et qui m’attend avec impatience). Alors, quand Libfly m’a proposé de pouvoir découvrir son dernier recueil de nouvelles ainsi que la possibilité de participer à un chat avec l’auteur j’ai sauté sur l’occasion. Je remercie donc Libfly et les éditions La Volte pour la découverte de ce livre. Ce recueil regroupe dix nouvelles, huit qui ont déjà été publiée et deux nouvelles inédites.

Les Haut Parleurs : Cette nouvelle nous dévoile un univers où le langage est devenu payant, seuls quelques mots sont encore libres de droits. De groupes altermondialistes essayent de rendre au langage sa liberté. Un texte empli de liberté qui nous offre une critique acerbe d’un monde qui tend de plus en plus vers la mondialisation et la gestion commerciale que ce soit le langage ou encore la météo. Ce texte se révèle vraiment prenant et efficace principalement grâce à la façon dont a l’auteur de jouer avec les mots, les expressions et les phrases mais aussi par son personnage principal, Spassky, un personnage humain rempli d’émotions et de sentiments qui fait que le lecteur s’attache directement à lui. La tirade finale de Spassky est d’ailleurs, pour moi, un véritable bijou. A méditer.

Annah à Travers la Harpe : L’histoire d’un père qui a perdu sa fille et qui doit partir à sa recherche dans un enfer très technologique. L’auteur critique à travers cette nouvelle, comme à son habitude, toute cette technologie qui finalement nous enferme et nous éloigne de tout le monde. A travers cette enfant surprotégé par la technologie qui devait l’empêcher de souffrir, de se perdre, ce technococon va l’enfermer. D’ailleurs malgré toutes les technologies possibles se père a quand même perdu sa fille et aujourd’hui doit partir à sa rechercher en enfer; un enfer technologique. On y retrouve des personnages pleins de souffrances, de pertes mais aussi d’amours, des personnages qui ne laissent pas indifférents. Un texte vraiment fort et soigné, mais dommage finalement que l’intrigue soit assez convenue et la fin sans surprise. Un texte tout de même très poétique et captivant du début à la fin.

Le Bruit des Bagues : Un homme vendeur marketing décide de changer de vie après avoir rencontré une fille dont il va tomber amoureux. Ce texte nous offre un critique vraiment intéressante de ce marketing profilé, ainsi que le profilage par une bague qui regroupe toutes les informations sur soi et permet un meilleur ciblage pour la vente. Mais il nous offre encore une fois une critique sur ce monde ou le pouvoir des marques et du commerce est devenu dominant. Mais c’est aussi un texte plein de liberté, d’espoir et d’amour à travers une résistance, certes classique, mais dont la puissance des mots utiliser par l’auteur touche. Un texte efficace et prenant qui force à réfléchir.

C@ptch@ : Cette nouvelle est l’une des deux nouvelles inédite de ce recueil et nous offre une histoire dans un univers où les enfants et les parents sont séparés. Régulièrement un enfant tente de traverser la ville sans se faire dématérialiser pour rejoindre ses parents. Un texte véritablement surprenant où l’auteur nous offre encore une fois une critique de la surtechnologisation ainsi que de ce besoin des réseaux sociaux et de pouvoir se démarquer, se faire reconnaitre. Un texte vraiment efficace, nerveux et plein de surprise mais qui au final, pour moi, manque quand même d’émotion et m’a paru un peu froid. Attention je l’ai apprécié, mais il ne m’a pas complètement transporté.

So Phare Away : Pour moi l’un des plus beaux textes de ce recueil avec un univers solide et passionnant où la communication se fait par la lumière Phare, l’auteur traite de la surcommunication, la communication inutile qui vient saturer le réseau et empêche de faire passer les messages vraiment importants. D’ailleurs l’utilisation de la surutilisation de la lumière pour montrer l’obscurité de la communication est vraiment intéressante et surprenante. L’auteur traite aussi de la société et des inégalités entre les personnes les plus riches et les plus pauvres. Au milieu de tout ça, deux personnes tentent de vivre leur amour, chacun dans leur phare, ne pouvant se retrouver qu’à chaque marée. Un amour poignant et sensible. Un texte véritablement poignant, prenant, pleine de sensualité, de magie et émouvant à la conclusion pleine de mélancolie et de surprise.

Les Hybres : Une histoire qui démarre de façon classique avec un artiste en perte d’inspiration qui va se retrouver à la limite de l’oubli, puis l’auteur glisse doucement dans le fantastique en nous dévoilant la source de l’inspiration de l’artiste. Un texte vraiment surprenant qui nous dévoile l’implication de l’art dans la vie de notre héros, sa « chasse » qui va se révéler traquer mais aussi être traqué. La métaphore de l’artiste qui va chasser son inspiration et va figer le tout est vraiment bien trouvé et efficace. Mais voilà, ce texte, comme C@ptch@ manque quand même de sentiment au point de vue des personnages, le texte est plaisant mais on s’accroche pas vraiment aux héros et on n’a pas pleinement l’impression d’être dans le texte.

El Levir et le Livre : El Levir est un scribe et il cherche à écrire Le livre. Alors j’ai eu un peu de mal à entrer dans le texte, j’avoue j’étais un peu perdu et je me demandais ou compter m’amener l’auteur, mais très vite je me suis retrouvé happé par ce texte où l’auteur cherche à montrer que parfois la forme est tout aussi, voir plus intéressante que le fond à travers Le livre que va écrire El Levir. El Levir ne se contente pas de l’écriture fixe et immuable, il nous offre une écriture tout en mouvement et en beauté, d’ailleurs c’est un peu ce qui ressort, pour moi, de cette nouvelle c’est la beauté de l’écriture du scribe. Et il faut toute la prouesse stylistique de l’auteur pour nous offrir et nous faire partager cette beauté. On ne peut que s’accrocher à la quête du scribe et au fait qu’il va donner sa vie de façon spectaculaire pour écrire les derniers mots au Livre.

Sam va Mieux : Un texte qui traite de la folie d’un homme qui se retrouve seul avec un enfant dans une métropole et qui, tous les jours, part à la recherche de possibles survivants. Un texte intrigant qui, j’avoue, m’a parfois un peu perdu l’auteur s’amusant avec différents systèmes de narrations. Très vite on se rend compte que ce système colle bien au personnage qui, devant sa solitude, perd la tête malgré son enfant. Puis très vite on se rend compte que tout n’est pas ce qu’on croit jusqu’à une fin assez efficace et surprenant. D’ailleurs une fin en forme de thérapie le personnage retrouvant certains souvenirs pour retrouver, un temps, la raison et repartir dans sa quête qui parait sans espoir. Mais voilà malgré la force de cette nouvelle encore une fois il y a ce manque d’émotion qui fait qu’on ne rentre jamais à 100% dans l’histoire.

Une Stupéfiante Salve d’Escarbilles de Houille Ecarlate : Second texte inédit de ce recueil qui nous raconte l’histoire de Ile qui a reçu le mu par le Barf une sorte de dieu enfant en forme de chat. Ce mu va le changer et mettre à mal son couple avec Aile une ange. Encore une fois on sent la passion de l’auteur pour le mouvement, le changement et cette fois il le traite de façon classique à travers un pourvoir qui permet à notre héros de changer, de s’adapter. L’auteur traite aussi, à travers le Barf, de l’enfance et de son insouciance et son insensibilité surtout quand on sait que le Barf est un dieu et que tout lui est permis. Un texte qui ne manque pas de philosophie, de magie mais qui reste tout de même assez linéaire dans son développement, je l’avoue.

Aucun Souvenir Assez Solide : Voilà une nouvelle courte qui ne fait que deux pages et qui nous compte la plongée d’un homme dans ses souvenirs pour retrouver un être aimée. J’avoue que j’ai du mal à critiquer ce texte, il y a quelque chose d’intéressant mais voilà il est tellement court qu’on n’a pas le temps de vraiment se l’approprier.

 

Un recueil de nouvelles qui ne manque pas de qualités mais aussi qui nous force à réfléchir que ce soit dans cette surconsommation de technologies qui nous prive de liberté ou ce réseau qui finalement ne nous rend pas plus humain ou intéressant, ou encore qui traite de sujet comme l’art, le livre, l’amour, la communication. L’auteur comme à son habitude nous offre une plume vraiment philosophique, prenante et captivante et surtout l’auteur sait jouer avec la langue nous offrant des textes vraiment surprenants et intéressants. Mais voilà parfois l’auteur cherche tellement à jouer avec l’esthétisme, les jeux de mots et la langue qu’il en oublie son histoire et surtout ses personnages, ce qui rend quelques fois les textes absents d’émotions et légèrement froids. Rien de bien dérangeant mais c’est dommage.

En Résumé : Je dois dire que j’ai passé un bon moment avec ce recueil de dix nouvelles. Alain Damasio sait nous offrir des textes avec des sujets de réflexions et de philosophie vraiment profonds, travaillés et captivants nous forçant à nous poser des questions. Des textes qui ne manquent pas de surprises, de sentiments de sensualités et de magies qui devraient ne pas laisser indifférents. Les personnages et les univers se révèlent vraiment efficaces et captivants. Mon seul regret est que l’auteur parfois se perd dans l’esthétisme de ses nouvelles au point de parfois rendre ses textes sans sentiments ce qui fait que, parfois, on a du mal à pleinement rentrer dans l’histoire.

 

Ma Note : 8/10

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  1. Les nouvelles de Damasio je n’y arrive pas ! Il est trop barré pour moi !

  2. Ahhhh je ne le connais pas celui-là ! Il faut que je déniche ça 🙂
    Merci !

  3. Je le lis petit à petit (3 nouvelles pour le moment, je m’arrête entre chaque), et je retrouve à la fois ce que j’aime chez Damasio, mais aussi ce que je n’aime pas, ce travail à outrance sur la
    langue, au point d’en écoeurer le lecteur…

  4. c’est très tentant, moi qui ai adoré sa plume si originale dans la Horde et la Zone. Je crains un peu le fait que ce soit dur à suivre comme tu le dis. Mais je le lirais bien un jour ou l’autre,
    obligé ^^

  5. Bonjour, je n’étais pas friande de l’anticipation en littérature, mais ça c’étais avant de me plonger dans les œuvres de Mr Damasio, il m’a donné le goût de la quête et la certitude d’un avenir
    possible.

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