Résumé : Et si tout était vrai ?
Dans son enfance, Jerry avait été pris par sa mère comme modèle pour le héros d’une série d’aventures magiques. Reclus, le vieil homme a été retrouvé par une jeune journaliste, Ruthie, bien décidée a obtenir une interview. Ensemble, ils vont découvrir que la réalité ressemble étrangement à la fiction. Dans les souterrains du métro de la ville, d’anciens mythes rôdent et des dimensions différentes sont reliées.

Edition : Les Moutons Electriques

 

Mon avis : Ce roman, j’en ai entendu parler la première fois c’était quelques mois avant sa parution, il avait été présenté par son éditeur qui l’avait très bien vendu au point que j’ai su qu’il finirait rapidement dans ma PAL. Appréciant les récits Fantasy urbaine, ce mélange de magie, de plongée dans les secrets souterrains et les métros, je ne pouvais ainsi pas passer à côté de ce dernier. Il est d’ailleurs étonnant de voir que Lisa Goldstein est finalement peu publié en France, alors qu’elle paraît plutôt connu et appréciée dans les pays anglo-saxons. Ce récit allait donc, pas la même occasion, me permettre ainsi de la découvrir. A noter aussi que ce livre a gagné le prix Imaginales 2018 du meilleur roman étranger traduit. Concernant la couverture, illustrée par Melchior Ascaride, je la trouve très réussie.

Ce roman va ainsi nous plonger à la découverte de Jerry qui vit reclus, consumé par la popularité forcée qu’il a connu suite à la publication par sa mère de romans le mettant en scène dans un monde imaginaire et qui a changé sa vie. Un jour, une jeune journaliste, Ruth, va tenter d’obtenir une interview, mais elle ne parait pas la seule à vouloir connaître les secrets de Jerry. Et si ce monde imaginaire ne l’était pas au final ? Jerry et Ruth vont ainsi se lancer dans une aventure qui va rapidement les dépasser. Alors que dire de ce roman une fois la dernière page tournée, déjà qu’il ne manque pas d’idée et que, dans l’ensemble, il se laisse lire avec un minimum de plaisir. Le soucis est qu’il se retrouve publié pour la première fois en France trop tard je trouve. Je m’explique, en 1999 au moment de sa publication en VO, je pense que ce genre de romans mélangeant métro, mondes imaginaires, passages sous-terrains vers l’imaginaire devaient être peu présent en Fantasy. Je pense même que Lisa Goldstein, même si je m’avance peut-être, devait être dans les précurseurs de cet aspect. Depuis de nombreux romans ont été publiés et des auteurs comme Neil Gaiman, China Miéville et d’autres ont apporté énormément au genre. Obligatoirement il y a un effet de comparaison et d’attente qui se crée, mais auquel le roman de Lisa Goldstein n’arrive jamais complètement à répondre à ce que je pouvais espérer, donnant l’impression d’avoir les idées sans la densité.

Le point le plus intéressant du roman vient clairement de son univers, en effet ici l’autrice nous offre en plus d’un monde mystérieux et plein de magie, un parallèle avec principalement la mythologie Egyptienne. On sent bien que Lisa Goldstein à du faire de nombreuses recherches et possède de nombreuses connaissances sur les mythes et légendes, principalement égyptiennes, mais oscillant aussi parfois vers d’autres contrées, offrant finalement un « monde souterrain », qui ne manque pas de richesse et de mythes. D’ailleurs cela en devient par moment un peu trop, donnant même parfois l’impression d’être une accumulation de folklores qui n’apportent pas toujours quelque-chose au récit. Ou alors il aurait fallu les développer plus, principalement dans la seconde partie, où l’ensemble va trop vite, accumulant un peu les scènes « mythologiques » sans arriver à les lier de façon totalement efficace au récit. Je pense principalement à certaines légendes Arthuriennes qui ont du mal à apporter quelque-chose d’autre au récit qu’un chapitre supplémentaire. L’autre idée intéressante du roman, selon moi, vient de cette idée des archétypes, dont je ne dévoilerai pas grand chose pour éviter de trop en révéler, mais qui m’a paru intéressante dans sa notion de figer les choses et tout ce que cela soulève comme thématiques.

Il y a aussi un aspect intéressant et original qui vient de l’envie de l’autrice de vouloir raccrocher son monde imaginaire à différents romans majeurs, différents auteur, comme par exemple Alice aux Pays des Merveilles, Peter Pan ou encore par exemple Le Hobbit. Ainsi les auteurs de ses romans auraient pu ainsi se retrouver plonger, eux aussi, dans ces mondes étranges, ce qui a par conséquent jouer sur leurs imaginations et amener leurs romans. Ainsi leurs livres ne seraient finalement qu’une représentation de ce « monde souterrain ». Sauf que voilà, encore une fois cela reste trop en surface à mon goût, Lisa Goldstein n’arrivant jamais complètement à lier son univers avec les autres, je trouve. Après rien de trop dérangeant, cela n’empêche pas cet univers de se révéler original et un minimum dense. Par contre là où j’ai été un peu frustré c’est que finalement cette toile de fond n’arrive pas à devenir un élément à part entière du récit, il n’en devient ainsi pas un « personnage » envoutant de l’histoire comme ont pu le faire d’autres auteurs, l’ensemble manquant parfois de fluidité d’envoûtement et aurait mérité un peu plus de travail selon moi.

Je suis aussi un peu déçu du traitement que propose Lisa Goldstein concernant les personnages de son roman. Ils ne sont que purement fonctionnels et, à une ou deux exceptions près, ne servent finalement qu’à faire avancer l’intrigue du récit. Cela se ressent principalement dans la relation entre Ruth et Jerry qui ne m’a jamais paru un tant soit peu chaleureuse et manquant même parfois grandement de crédibilité. Finalement je n’ai ainsi jamais réussi à vraiment m’intéresser pleinement aux personnages qui ne sont, en définitive, que des outils pour le récit, pas aidé non plus par des dialogues qui m’ont paru globalement d’une platitude assez dérangeante. Ils ne m’ont jamais franchement touché, mais surtout les liens entre les différents protagonistes ne m’ont jamais paru concrets, construit sur une base à minima logique. Ainsi, que ce soit aussi bien entre Jeff et Ruth où on sent que leurs relations et leurs évolutions servent plus l’intrigue qu’autre chose, mais aussi avec l’arrivée d’un troisième personnage dont je ne dirai rien pour ne pas spoiler, mais qui n’arrive pas à créer complètement de liens, ni avec nos héros, ni avec le lecteur, je n’ai jamais eu ce déclic qui m’aurait poussé à me laisser porter par les héros. Après il y a quand même des choses intéressantes, principalement dans la façon dont Ruth évolue ou encore dans la représentation de Jerry.

En effet ces deux personnages arrivent à nous offrir quelques réflexions intéressantes, Ruth nous questionnant ainsi sur la position de la femme, principalement à cette époque, étant une femme divorcée avec une petite fille à s’occuper. Une femme qui doit se battre pour s’imposer et simplement gagner sa vie. Alors parfois c’est caricatural et parfois ça manque de finesse, mais dans l’ensemble ça fonctionne. Dans un autre registre, Jerry lui nous fait réfléchir sur la notion d’enfant star, du passage de l’enfance à l’adulte et des difficultés que cela peut entrainer de passer du monde magique au monde réel avec toutes les souffrances que cela peut apporter. Il y a aussi d’autres réflexions sur la notion d’amour ou encore de technologie, principalement vers la fin, et sur son emprise de plus en plus présente sur notre société, même si cette dernière aurait mérité d’être un peu plus travaillée.

Le récit est menée sur un rythme incisif, limite sans temps-morts, ce qui fait que cela pousse le lecteur à tourner les pages pour en apprendre plus, mais amène aussi comme problématique de donner l’impression d’aller un peu trop vite. La résolution des différentes péripéties ne paraissent ainsi tomber régulièrement que parce qu’il faut faire avancer l’intrigue et non grâce au héros, ce qui est dommage. J’ai aussi trouvé par moment que l’autrice oubliait la règle du « Montre, ne le dit pas », voulant trop ancrer visuellement son monde, mais par conséquent limitant l’imagination du lecteur et aussi l’aspect poétique qu’auraient pu offrir ces lieux. Pour autant tout n’est pas mauvais, l’ensemble se laisse lire, offre un minimum de divertissement, bien porté par une tension et une cadence plutôt efficace, nous plongeant dans un univers avec de bonnes idées et le tout porté par une plume simple. Mais voilà, selon moi, d’autres auteurs m’ont paru offrir mieux sur des sujets équivalents et, de plus, la construction du récit souffre d’imperfections parfois frustrantes. Ainsi même si le livre se laisse lire, je ne suis pas sûr de lire d’autres romans de l’autrice, n’ayant pas ce petit quelque-chose qui pourrait me marquer.

En Résumé : Je ressors avec un sentiment plutôt ambigu concernant ce roman. Si je l’avais lu à l’époque de sa publication en VO, je pense que mon avis aurait pu être complètement différent. En effet, depuis d’autres auteurs comme Neil Gaiman ont aussi apporté leurs pierres à ce type d’Urban Fantasy, rendant ainsi le roman de Lisa Goldstein, je trouve, moins intéressant et efficace. Il reste sympathique à lire, principalement dans son univers qui, même s’il n’est pas parfait cherchant à trop en faire, s’avère offrir des idées intéressantes. On sent ainsi que l’autrice s’est beaucoup renseignée pour construire un monde, mélange de nombreux mythes et légendes, offrant quelques bonnes idées. Le récit offre aussi quelques réflexions intéressantes sur la position de la femme, la notion d’enfant star, de passage à l’âge adulte, ou bien encore sur l’amour ou la technologie, et même si parfois c’est un peu simpliste ou ça manque de finesse dans l’ensemble ça fonctionne. Maintenant, ou le fait que comparé à d’autres livres il soit moins marquant, j’ai aussi trouvé que Lisa Goldstein avait quelques soucis dans la construction de son récit. Ainsi j’ai trouvé les personnages peu intéressants, ne se révélant finalement que de simples outils à l’intrigue, sans arriver à créer de liens, que ce soit entre eux, comme avec le lecteur. Le rythme de l’intrigue est rapide, sans temps morts, parfois même un peu trop tant la résolution de certaines péripéties ne paraît survenir que pour passer à la suivante plus que par les capacités des personnages. L’autrice oublie aussi parfois la règle du « montre, ne le dit pas », ce qui joue obligatoirement sur le pouvoir d’imagination du lecteur. La plume est simple, plutôt efficace dans sa phase narrative, mais offre par contre des dialogues que j’ai trouvé souvent très plats. Dans l’ensemble le roman reste plutôt divertissant, mais loin d’être marquant et je ne suis pas sûr de lire d’autres écrits de Lisa Goldstein.

 

Ma Note : 6/10

 

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