Résumé : Sur la Lune, deux ans après les événements qui ont précipité la chute de la famille Corta, les Mackenzie se sont approprié les restes de leur entreprise. Il n’y a donc plus que quatre «Dragons», ces consortiums familiaux qui se partagent l’exploitation des ressources lunaires et, donc, le pouvoir. Pourtant, les Mackenzie se déchirent sur les cadavres encore frais de leurs ennemis de toujours. Les Sun continuent, discrètement, à élaborer des plans visant à affaiblir leurs adversaires. Les Vorontsov vendent toujours leurs indispensables services au plus offrant. Et les Asamoah tentent tant bien que mal de préserver leur neutralité de façade. Mais le statu quo, même sous gravité réduite, n’est jamais acquis. D’autant que les rares survivants de la famille Corta – blessés, en fuite ou sous la protection d’autres Dragons – n’ont pas dit leur dernier mot.
Edition : Denoël Lunes d’Encre
Traduction : Gilles Goullet
Mon Avis: Il y a environ un an maintenant, je me suis rapidement plongé dans le premier tome de cette trilogie de Ian McDonald. Il faut dire que l’auteur ne m’avait jamais déçu, proposant des romans toujours prenants, denses, soignés et fascinants et il était donc logique que ce Luna, Nouvelle Lune termine entre mes mains. Et je n’ai pas été déçu, car même si l’auteur proposait un récit dans un genre un peu différent de ce qu’il faisait d’habitude, cela ne m’a pas empêché de passer un excellent moment de lecture avec une histoire efficace, dense et pleine de tension (ma chronique ici). Il était donc logique que je me jette rapidement sur le second tome de ce cycle dès sa publication. Concernant la couverture, illustrée par Manchu, je la trouve très jolie. Par contre, chronique d’un tome 2 oblige, je vais en partie spoiler le tome 1, évitez donc de lire cette chronique si vous n’avez pas lu le premier tome.
Deux ans ont passé depuis la fin des évènements du premier tome qui ont vu l’effondrement de la famille Corta. Lucas a réussi à s’échapper, s’est mis sous la protection des Voronstov et décide de se lancer dans un plan impossible pour retrouver le pouvoir qu’il a perdu. Pendant ce temps, sur la lune, les autres « Dragons » continuent à évoluer et voient la puissance des Mckenzie s’envoler. Robson, suite à la destruction des Corta, est devenu un Mckenzie à part entière, tandis que Lucasinho vit dans la débauche chez les Asmoah et qu’Ariel ne gère plus, en tant qu’avocate, les contrats de mariage et de séparations en tentant de survivre avec Marina. Sauf que sur la Lune, rien ne se passe jamais comme prévu. Franchement, je ne vais pas le nier, ce fût un plaisir de replonger dans ce second tome, à tel point que j’ai eu du mal à le lâcher du début à la fin. Alors je ne vais pas le nier, on est clairement dans un tome qui est un peu de transition, où les différentes pièces se déplace sur l’échiquier, mais cela ne l’empêche pas d’être réussi. Car oui, l’auteur a bien compris que transition ne voulait pas pour autant dire, attentiste, et même si ce tome ne proposera pas autant d’éléments percutants et de découvertes que le premier, cela ne l’empêche pas d’offrir un récit tendu, efficace, où les jeux de pouvoirs ne manquent pas de captiver et offrent de nombreuses surprise, tout en construisant un récit maîtrisé et soigné.
L’univers qui est mis en place reste toujours aussi intéressant et passionnant à suivre et à découvrir je trouve, principalement dans la vision du futur que nous propose Ian McDonald. L’aspect technologique est toujours aussi fouillé, attrayant et plein d’imagination, ne manquant pas de bonnes idées et même d’originalité, autant pour améliorer les choses que pour créer des problèmes, que ce soit aussi bien sur la Lune comme sur Terre. Car oui, le second point intéressant de ce roman vient du parallèle entre la vie sur les deux astres que l’on commence à discerner. On découvre ainsi une Terre dépendante de l’énergie qui arrive de la Lune, perdu dans des pouvoirs étatiques, des lois, et qui aimerait mieux contrôler son astre nocturne pour s’émanciper et ainsi retrouver un contrôle en parti perdu. De l’autre côté on a la Lune, où la vie ne repose pas sur les lois, ni sur le pouvoir d’un état, mais sur des contrats, sur la puissance de son entreprise, astre où quasiment tout est permis même les évènements les plus vils. Deux visions complètements différentes, qui évitent de se télescoper pour éviter d’empirer une paix pas si solide, mais qui soulèvent de nombreuses questions intéressantes, montrant aussi d’une certaine façon que sur Terre comme sur la Lune la vie est extrêmement complexe. On se rend compte aussi que la vie sur la Lune entraine des conséquences avec le retour de Lucas sur Terre, que ce soit aussi bien d’un point de vue physique, mais aussi dans la vision que peuvent avoir les gens de lui ; devenant limite un étranger, un extra-terrestre.
Pour autant ce qui, selon moi, rend cet univers plus vivant et palpable ce sont les petits détails mis en avant ici ou là, que ce soit dans l’évolution de cocktails, les changements de mode qui, même si parfois l’auteur va un peu loin, donne une véritable évolution dans la vie sur la Lune, une notion de vie et de changement. Le monde continue de tourner, d’avancer et ce soin qu’apporte l’auteur au niveau de la précision pour nous le montrer, offre un vrai plus dans l’appréhension qu’on a de celui-ci je trouve. L’aspect « politique », ou plutôt dirons nous de domination des Dragons, monte encore d’un cran en intensité avec ce tome, chaque clan cherchant peu à peu à sortir son épingle du jeu, à continuer à survire, à avancer et à faire des bénéfices. Les Corta maintenant disparu cela va obligatoirement amener des changements, de nouvelles allégeances, de nouvelles manipulations, de nouveaux calculs, le tout amené de façon cohérente, intelligente et intéressante, surtout que de nouvelles forces apparaissent. On sent que l’auteur maîtrises ses lignes d’intrigues, les dévoilant lentement de façon captivante, et où la gloire peut arriver aussi vite que la mort. Personne n’est épargné.
Concernant les personnages, on est toujours dans un roman suivant plusieurs personnages, où chacun d’entre eux s’avère intéressant à découvrir se révélant, dense, complexe et travaillé. C’est d’ailleurs un des autres points forts, selon moi, du roman, la construction des différents protagonistes, le fait qu’ils se révèlent humains dans leurs choix et leurs visions, mais surtout ne tombant jamais dans une binarité, un manichéisme qui pourrait être pourtant si facile. On s’en rend ainsi compte dans les différentes alliances qui se font et se défont, mais aussi dans les choix de certains. Ce tome va ainsi nous permettre aussi d’en apprendre plus et de découvrir un peu mieux le personnage de Wagner Corta, le loup, qui, je trouve, gagne ici en intérêt, montrant de lui à la fois ses forces, mais aussi ses faiblesses, un personnage ambigu qui cherche finalement à survivre. On retrouve aussi Lucas toujours aussi manipulateur, qui va tout faire pour que le nom des Corta ne disparaisse pas, ou bien aussi Lucasinho qui essaie de cacher ses blessures dans l’oubli, la fête et l’alcool, mais qui va bien devoir un jour agir. J’attendais peut-être un peu plus d’Ariel, dont on nous parle de l’importance qu’elle a depuis le premier tome, mais je ne doute pas qu’elle devrait surtout prendre de l’ampleur dans le dernier tome. Cela ne l’empêche pas pour autant d’être intéressante dans la façon dont elle avance, elle évolue et dans sa relation avec Marina. Reste Robson, qui n’est pas un mauvais personnage dans sa construction, loin de là, se révélant, je trouve touchant et intéressant, mais qui contrairement aux autres parait plus spectateur qu’acteur des évènements. A voir comment il va évoluer par la suite.
Alors, je pourrai reprocher, c’est vrai, à ce tome une légère baisse d’intensité vers le milieu, principalement dans le développement d’un nouveau personnage Corta qui , sans se révéler inintéressant, aurait peut-être mérité un peu moins de pages, mais franchement rien de très dérangeant tant l’ensemble est toujours entraînant, percutant et plein de surprises. On notera aussi une ou deux transitions peut-être un chouïa rapide, comme ce qui tourne autour de l’Aigle, mais là je chipote un peu. Concernant la conclusion, à nouveau l’auteur sait à quel moment accélérer pour happer le lecteur, le pousser à tourner les pages et à voir ce qui va bien arriver, qui va s’en sortir intact des évènements qui surviennent. Une conclusion intelligente, pleine de tension, d’action et de rebondissements qui offrent un final haletant et entraînant qui donne encore plus envie de lire le troisième et dernier tome de ce cycle (qui sort en VO courant de l’année donc VF pas avant 2019 je pense), le tout porté pas une plume qui est toujours aussi soignée, captivante et entraînante.
En Résumé : J’ai à nouveau passé un très bon moment de lecture avec ce second tome de ce cycle qui, même s’il se révèle un peu de transition, garde en grande partie les qualités qui faisaient la réussite du premier tome. L’univers est toujours aussi intéressant et captivant à suivre que ce soit dans son aspect technologique, social et politique avec de nombreux jeux de pouvoirs et de manipulations complexes et entraînants. L’autre intérêt vient aussi de la découvert de la vie sur Terre et du parallèle qu’il y a avec la Lune. Un univers vivant, fascinant, où la gloire arrive aussi vite que la mort et qui donne clairement envie d’en apprendre plus. Concernant les personnages ils sont toujours l’un des points forts du roman, se révélant humains, complexes et intéressants à suivre, même si j’avoue j’attendais peut-être un peu plus d’Ariel et j’ai trouvé que Robson était plus spectateur que acteur de ce qui arrive. Alors après, c’est vrai, on pourrait noter une légère baisse de tension vers le milieu du roman, ainsi qu’un ou deux transitions un peu rapide, mais franchement rien de bien bloquant tant l’ensemble est haletant et fait qu’on tourne les pages rapidement avec l’envie d’en apprendre plus. Le final se révèle captivant, plein de surprises et de rebondissements, le tout sur un rythme enlevé et efficace, qui donne envie de lire rapidement le troisième tome, le tout porté par une plume soignée, vive et captivante.
Ma Note : 8,5/10
Autres avis : Apophis, Samuel Ziterman, Victor Montag, …
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